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1789
: La cocarde tricolore |
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Situation
du royaume –
Agitation… -
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La cocarde
tricolore est le symbole par excellence de la Révolution,
et les couleurs qui la constituent représentent l'idée
même de la nation française.
Si l'on sait que les symboles portent en eux bien plus qu'il ne
paraît à première vue, on ne peut être
qu'étonné du flou dans lequel est toujours restée
l'origine de cette cocarde, qui n'a été fixée
par aucun texte officiel connu et reconnu. On verra pourtant dans
la suite de cet article qu’un texte officiel a existé, mais
qu’il a disparu des registres de l’histoire.
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Deux thèses
sont couramment avancées pour expliquer la naissance de la
cocarde tricolore :
- la première est que le roi Louis XVI, lorsqu'il vint à
Paris trois jours après la prise de la Bastille, reçut
des mains du nouveau maire la cocarde aux couleurs de la ville que
les Parisiens avaient adoptée, et qu'en la fixant sur la cocarde
blanche qui ornait son chapeau, il inventa la cocarde tricolore ;
- la seconde, niant la première, affirme que c'est La Fayette
qui 1'aurait proposée à la fin du mois de juillet.
Or, il ressort clairement de la confrontation des documents contemporains
relatant les journées de juillet 1789 que la cocarde bleu-rouge-blanc
existait avant le 17 juillet, ce qui infirme
les deux thèses précitées. On peut se demander,
alors, pourquoi pendant deux cents ans, personne ne semble l'avoir
remarqué, pourquoi l'histoire a été négligente
ou aveugle sur ce point.
Car si l'histoire a été trompée sur le symbole,
ne l'a- t-elle pas été aussi sur ce qu'il symbolisait
? |
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Tous les auteurs
qui ont traité de la cocarde ont toujours dit qu'il y avait
eu trois cocardes qui se sont succédé :
1 ° la cocarde verte arborée le 12 juillet,
2° la cocarde bleue et rouge, aux couleurs de la ville de Paris
qui a remplacé la verte le 13,
3° la cocarde tricolore, par adjonction du blanc à la
cocarde précédente, qu'elle a remplacé. |
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Or, s'il est
vrai qu'il y a eu trois cocardes, aucun historien n'a vu qu'elles
ne se sont pas succédé, mais qu'il y avait en même
temps deux cocardes différentes, remplissant des rôles
différents, et que la chronologie de la cocarde s'établit
comme suit :
1 ° Le 12 juillet, la cocarde verte est arborée comme signe
d'insurrection, et est portée par tous ceux qui se réclament
du Tiers Etat ;
2° Afin de désarmer les bandes armées qui effraient
la ville, une milice bourgeoise est instituée. Ses membres,
qui doivent être connus et inscrits dans les districts, doivent
porter une cocarde bleue et rouge, qui leur est réservée.
Cette cocarde coexiste avec la cocarde verte, portée, en guise
de passeport, par tous ceux qui affichent leur sympathie pour le Tiers
Etat, à l'exception des membres de la milice bourgeoise.
3° Lorsqu'on s'aperçoit que le vert est la couleur personnelle
du comte d'Artois, frère du Roi et chef de la "faction
aristocratique", on proscrit cette couleur et une nouvelle cocarde
est créée, bleue, rouge et blanche, qui remplit maintenant
ce rôle de passeport ; elle est portée par tous, femmes,
enfants, prêtres, à l'exception toujours de la milice
bourgeoise qui continue à porter sa cocarde uniforme bleue
et rouge. |
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Bien sûr, tout ceci écorne un peu l'image d'un peuple
uni s'armant pour s'opposer au despotisme et pour asseoir les droits
de l'homme. Et on peut se demander si la révolution de Paris
en 1789 n'est pas le fruit d'une manœuvre habile, se servant de
la peur qu'inspire la masse du peuple (la "canaille")
à la bourgeoisie, pour forcer celle-ci à s'armer,
et faire ainsi pièce au pouvoir royal.
On remarquera
que, dans les grandes villes du midi, l'armement de la bourgeoisie
se déroule dès le mois de mars selon le même
scénario ; qu'il se reproduit à Lyon au début
juillet, et qu'il se répétera dans une grande partie
de la France au mois d'août par le phénomène
connu dans l'histoire sous le nom de "grande peur". Et
la recette servira encore au mois d'octobre, pour assurer la docilité
du peuple par la proclamation de la loi martiale. Curieusement,
à chacune de ces manœuvres se trouve accolé le nom
du même personnage : le comte de Mirabeau
; pure coïncidence, peut-être...
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Mais ne nous
aventurons pas trop loin. Le but de cette étude n'est que de
tenter de voir clair dans l'histoire de la cocarde tricolore ; retraçons-la
telle qu'elle se présente à la lumière d'une
confrontation nouvelle des témoignages. |
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Situation
du royaume –
1789. La situation financière du royaume est catastrophique.
Le Roi - l'Etat - n'est plus capable de faire face à ses obligations
: dépenses publiques et militaires, pensions accordées
aux courtisans et intérêts à payer à ceux
qui ont avancé de l'argent sous forme d'emprunts - les rentiers
- écrasent le peuple. Le Clergé et la Noblesse, les
deux ordres privilégiés, ne paient pratiquement rien.
Le Tiers Etat supporte seul le poids de la dette. Pour trouver une
solution, le Roi a convoqué les Etats Généraux,
assemblée de députés des trois ordres. Comme
la dernière assemblée remonte à l'an 1614, cette
convocation prend figure d'événement et tout le monde
espère qu'il en sortira une solution définitive aux
maux du royaume. D'autant que le Roi, conseillé par son ministre
des finances, le très populaire genevois Necker, vient d'accorder
au Tiers Etat de désigner deux fois plus de députés
que chacun des deux autres ordres. |
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Mais
un nouvel élément vient aggraver le problème
: l'hiver le plus froid et le plus long du siècle s'abat sur
l'Europe et, peu attentif aux problèmes politiques, il n'épargne
pas la France. Les moulins sur les rivières gelées ne
produisent plus de farine, les routes bloquées empêchent
l’acheminement des vivres, les paysans et les ouvriers ne peuvent
plus travailler et doivent vendre leurs quelques meubles, jusqu'à
leurs outils, pour pouvoir subsister. La misère engendrée
par cette situation fait refluer vers les villes des milliers de misérables,
qui créent une insécurité considérable
dans les villes, particulièrement à Paris. En même
temps, le prix du pain ne cesse d'augmenter. Les élections
des députés et la rédaction des cahiers de doléances
se font dans un climat d'inquiétude, causé par l'agitation
grandissante : des émeutes occasionnées par le prix
élevé du pain se propagent dans tout le pays. A Marseille
et à Aix, tandis que le comte de Mirabeau, rejeté par
la noblesse, mène campagne pour se faire élire député
du Tiers Etat, des émeutes violentes poussent la bourgeoisie
à se former en milice pour veiller au respect des propriétés
et pour procéder au désarmement de la populace. Le même
scénario se reproduit à Montpellier le 18 avril, puis
à Orléans le 25. |
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L'hiver
1788-1789
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Le
27 et le 28 avril, c'est à Paris même qu'une émeute
ravage le faubourg Saint-Antoine. Les émeutiers mettent à
sac la maison et la manufacture du fabricant de papiers peints Réveillon.
La répression, menée par les Gardes Françaises
et le régiment de cavalerie Royal Cravatte, fait de nombreux
morts (1). Chaque bourgeois se sent maintenant directement menacé
dans ce qu'il a de plus cher : ses biens.
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Emeute
Réveillon
1. Le nombre
exact de tués n'a jamais pu être déterminé.
Le libraire Hardy, dans son journal manuscrit, rapporte que la police
le faisait monter à 933 personnes. Ce chiffre est probablement
très exagéré, mais il est significatif du traumatisme
que l'émeute avait causé. |
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Lorsque
les Etats Généraux s'ouvrent à Versailles le
5 mai, c'est la France entière qui semble avoir retenu sa respiration.
Mais l'accord espéré entre les trois ordres ne se fait
pas : les deux ordres privilégiés refusent d'accorder
le vote par tête, et exigent qu'on continue à voter par
ordre, ce qui rend nul le doublement du Tiers, et continuerait d'assurer
la prépondérance aux partisans du passé et des
privilèges.
Le 17 juin, après de longues tergiversations, le Tiers Etat
se proclame Assemblée nationale, c'est-à-dire
seul représentant légitime de la Nation.
Le 20 juin, les députés prêtent serment de ne
pas se séparer avant qu'ils aient donné une constitution
au royaume (serment du Jeu de Paume).
Le 23 juin, le Roi, devant les trois Ordres convoqués en séance
royale, déclare nulles les décisions du Tiers et ordonne
aux Etats de se séparer. Mais le Tiers refuse d'obtempérer
aux ordres du Roi (voir Séance royale). Le 27 juin, le Roi
doit céder, et voyant qu'une partie du clergé et de
la Noblesse a rejoint le Tiers, il engage les autres à suivre
leur exemple. Le Tiers a gagné : l'Assemblée nationale
dans laquelle on votera par tête donnera une constitution au
royaume et supprimera les abus. La révolution est-elle faite?
Non, car il est peu probable que l'aristocratie se laisse dépouiller
de ses privilèges sans réagir. Or, l'aristocratie tient
l’armée, et il s'agit pour la bourgeoisie de traduire au niveau
de la force armée le changement de pouvoir qui s'est produit
au niveau des institutions. |
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23
juin 1789 :
Séance royale |
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Agitation…
A Paris, la tension est vive. Au Palais-Royal, le
quartier à la mode, une foule d'étudiants, d'avocats,
de journalistes et autres tenants des idées nouvelles suit
avec passion, heure par heure, les événements de Versailles.
On redoute une réaction brutale des privilégiés,
tendant à remettre les choses dans leur ordre ancien, en
procédant à la dissolution de l'Assemblée nationale,
et en proclamant la banqueroute, qui permettrait au gouvernement
de ne pas honorer sa dette, mettant du même coup sur la paille
tous ceux qui lui ont avancé des fonds dans l'espoir d'un
profit substantiel.
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Ce n'est
pas sans inquiétude qu'on remarque qu'une armée se rassemble
dans les environs de Paris, composée en majeure partie de troupes
étrangères. On insinue aussi que la faction aristocratique
utiliserait "la canaille" pour susciter des troubles à
Paris, donnant ainsi un prétexte pour envoyer les troupes rétablir
l'ordre et occuper militairement la ville. Le bruit court que soixante
mille brigands étrangers seraient arrivés dans la ville,
venant d'Italie, d'Angleterre et d'Allemagne, "pour augmenter
le désordre, et troubler les opérations des Etats-Généraux".
(Quinzaine mémorable, p 15). |
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La
Quinzaine mémorable |
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A Paris,
l'élection s'était déroulée à deux
degrés. Chacun des seize quartiers de la ville avait été
divisé en trois ou quatre circonscriptions électorales,
formant un total de soixante districts. Etaient seuls admis à
voter les habitants payant une capitation d'au moins six livres, ce
qui excluait la majorité de la population de la capitale. Les
votants s'étaient réunis dans les églises qui
formaient le lieu d'assemblée de leur district, et avaient
élu trois cents et quelques électeurs, lesquels à
leur tour avaient désigné les vingt députés
du Tiers Etat de la ville de Paris, parmi lesquels on comptait l'astronome
Bailly, le docteur Guillotin et l'abbé Sieyès. |
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districts
de Paris
Bailly
Guillotin
Sieyès
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Afin
de correspondre avec leurs députés pendant la durée
des travaux des Etats-Généraux, les électeurs
de Paris avaient pris l'engagement de se réunir régulièrement,
et formèrent ainsi, avec des représentants du clergé
et de la noblesse qui s'étaient joints à eux, l'assemblée
des Electeurs, qui jouera un rôle important dans la suite de
cette histoire. |
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Le 26
juin, l'assemblée des Electeurs demande l'établissement
d'une milice bourgeoise pour la garde de la ville.
L'idée fait son chemin, puisque l'auteur anonyme de la Quinzaine
mémorable note, à la date du 3 juillet, qu'on parle
de lever une milice bourgeoise pour dissiper la foule de gens de sac
et de corde qui, n'ayant rien à perdre, cherchent à
mettre le désordre partout, et infestent particulièrement
le Palais-Royal depuis longtemps (p.13). |
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Le 8
juillet, c'est Mirabeau qui, à l'Assemblée nationale,
réclame que la sûreté des villes de Paris et de
Versailles soit confiée à des milices bourgeoises.
Le 10 juillet, à l'assemblée des Electeurs siégeant
à l' Hôtel-de-Ville, Bancal, Bonneville, Pitra insistent
encore sur la nécessité d'organiser une garde bourgeoise. |
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A
suivre : Explosion |
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