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1789 : La cocarde tricolore

     
  Début de l'article
Chapitre 2
     
 

 

Chapitre 3
La prise de la Bastille et ses suites

Disparition d'un texte -
Reconnaissance par le roi
Diffusion dans le royaume -


 
 
       
  La prise de la Bastille et ses suites

Le 14 juillet, le désarmement de la populace n'est pas encore terminé :
A Paris, ce 14 juillet. (...) On arrête les personnes qui portent des fusils sans s'être fait inscrire dans la milice bourgeoise, et on n'est inscrit que dans le quartier de son domicile. On parviendra aussi, j'espère, à chasser tous les vagabonds. On dit qu'on pendra deux voleurs arrêtés par la milice bourgeoise.
(Lettre d'un officier aux Gardes Française à son père, publiée dans la Revue Rétrospective, 1889 II).
     
 

 

Afin de se procurer des armes, les Parisiens envahissent le garde-meubles de la Couronne, place Louis XV (aujourd'hui place de la Concorde), et l'Hôtel des Invalides, où ils font main basse sur une quantité impressionnante de fusils.
La Bastille, sinistre forteresse où les gens de qualité peuvent être enfermés par un simple ordre du Roi, est le symbole de l'arbitraire royal. En outre, elle renferme des armes. Deux excellentes raisons pour s'en rendre maître. Les Parisiens, milice bourgeoise et ouvriers du faubourg Saint-Antoine, appuyés par deux détachements de Gardes-Françaises, en entreprennent le siège et s'en rendent maîtres après quelques heures.

   
  Le gouverneur, le marquis de Launey, accablé d'outrages, est conduit à la Grève, où il est massacré. Le bruit se répand -mais il n'a jamais pu être établi si le fait est vrai - qu'on trouva dans ses poches des papiers compromettants pour le Prévôt des Marchands, qui aurait entretenu une correspondance avec Launey pour l'engager à résister pendant que lui- même, président du comité permanent, tâchait de faire perdre du temps aux Parisiens. La lettre trouvée sur le cadavre du gouverneur de la Bastille aurait porté les mots suivants : « J'amuse les Parisiens avec des cocardes et des promesses, tenez bon jusqu' à ce soir et vous aurez du renfort. « (17).  
Prévôt des marchands :
de Flesselles
 
  17. C'est le texte donné par le Cousin Jacques dans sa brochure "Histoire de France pendant trois mois", parue en août 1789, et dans l'Histoire de la Révolution de 1789 par deux amis de la liberté, Paris, 1790, t. 2, p. 60.      
  Que cette lettre ait existé ou non, son contenu colporté et le fait qu'il ait valu à Flesselles une mort immédiate et ignominieuse confirment l'hypothèse selon laquelle les membres du comité permanent auraient perdu un temps précieux à parler de cocardes sous la présidence du Prévôt des Marchands, et que celui-ci aurait joué un rôle déterminant dans le choix du nouvel insigne (18).      
  18. Ce rôle déterminant du Prévôt des marchands dans le choix du nouvel insigne est encore confirmé par l'extrait suivant du journal l'Observateur, de Feydel, du 27 septembre 1789 : "La cocarde, que le gouvernement fit arborer dès le 12 juillet par ses espions, afin de donner au maréchal de Broglio un prétexte pour faire entrer des troupes dans Paris, devint en peu d'heures le signal de l'union la plus intime. La cabale ministérielle se trompa dans ses calculs. En vain le Prévôt-des-Marchands Flesselles essaya-t-il de nous diviser par la différence des couleurs: nos cocardes ne se ressemblaient pas et nos cœurs se ressemblaient. Français, ne quittons pas la cocarde que la constitution ne soit faite et promulguée: ce n'est pas l'uniforme qui nous a sauvés ; c'est la cocarde."      
  Suspecté de trahir la cause des Parisiens, interpellé violemment, pressé de se rendre au Palais-Royal pour y être jugé, Flesselles aurait répondu simplement : « Eh bien! Messieurs, allons au Palais-Royal », et quitté l'Hôtel de Ville. Quelques minutes plus tard, les électeurs apprennent que M. de Flesselles avait traversé la place de Grève sans éprouver aucun mauvais traitement ; mais qu'au quai Pelletier, un coup de pistolet parti d'une main inconnue l'avait frappé à la tête et étendu sur la place. Le procès-verbal des électeurs n'en dit pas plus. Il y a beaucoup de divergences dans les témoignages sur la mort de Flesselles. Pour les uns, il est frappé au sortir de l'Hôtel de Ville, pour les autres, c'est sur le chemin vers le Palais-Royal.      
 

De toutes les personnes tuées dans ces journées de violence, il est le seul a avoir été "descendu" d'un coup de pistolet.
Exécution ? Toutes les autres victimes ont été massacrées, déchirées par la foule, ou pendues. Est-ce un simple hasard ?
Qui a tué Flesselles ? Dans des notes de Moreau de Saint- Méry, président de l'assemblée des Electeurs (donc pas n'importe qui) il est écrit :
"Il est faux qu'on ait trouvé sur Flesselles une lettre de Launey. Il allait au Palais-Royal se justifier, disait-il, lorsque B. lui brûla la cervelle. Alors on lui coupa la tête. C'est le premier sur qui le peuple ait exercé ce trait de rage. Par imitation, on coupa la tête de Launey dont le cadavre était resté par terre devant l' Hôtel de ville." (19).
Qui est ce "B." dont Moreau de Saint-Méry ne veut ou n'ose écrire le nom? Qui à ce jour s'est intéressé à la mort de celui qui paraît bien être l'inventeur de la cocarde tricolore?

     
  19 Cité par P. de Vaissière, Lettres d'Aristocrates, p 60. Archives du ministère des colonies, collection Moreau de Saint- Méry, F3, vol 140 bis, fol 54.      
 


     
       
 

Disparition d'un texte

Flesselles mort, son nom devient synonyme de trahison, de perfidie. Au Palais-Royal, l'électeur Soulès, muni d'une commission du comité permanent, s'occupe à recruter une compagnie de cavalerie, et a déjà enrôlé quarante jeunes gens, lorsqu'on apprend la nouvelle de la trahison et de la mort du Prévôt des Marchands. Comme sa commission portait la signature du président du comité, du traître Flesselles, chacun se retire, malgré les efforts de Soulès. Le titre même de Prévôt des Marchands est devenu odieux, et c'est pour cette raison que son successeur, Bailly, recevra le titre de maire.

 
Soulès
 
 

Etait-il imaginable de laisser au bas de l'arrêté qui instituait la cocarde tricolore, de œ qui allait devenir "le signe sacré de la rédemption", le nom du traître, de l'infâme Flesselles. Il n'y avait que deux solutions : soit faire disparaître le nom de Flesselles au bas de l'arrêté ; soit faire disparaître l'arrêté lui-même. Apparemment, c'est la seconde solution qui a prévalu. L'arrêté, dont l'existence est attestée par un arrêté de l'assemblée de la commune de Paris du 4 octobre 1789 (voir plus bas), par Gouvion, par la Quinzaine Mémorable, ne se retrouve ni dans le Procès-Verbal des Electeurs, ni dans le Mercure de France, ni dans les Révolutions de Paris, ni dans aucun autre journal, ni dans aucune collection de lois et arrêtés, alors que tous ces ouvrages ont donné l'arrêté instituant la milice parisienne. Cet arrêté manque aux archives de l'histoire. Alors qu'on conserve tous les décrets, lois et arrêtés, celui qui a institué les couleurs nationales, et qui a existé, est introuvable. Plus incroyable encore, personne, semble-t-il, ne l'a jamais cherché, et personne ne s'est jamais avisé de son absence...

   
       
  Reconnaissance par le roi
Le 15 juillet, une députation de l'Assemblée nationale se rend à Paris. A son retour, elle fait part aux autres députés de l’accueil enthousiaste dont elle a été l’objet de la part des Parisiens. Jacques-Antoine Creuzé-Latouche, député du Tiers Etat de Chatellerault, note ce soir-là dans son Journal :
 
Creuzé-Latouche
 
  " On leur donnait des cocardes, que tous les habitants avaient prises. Dès lundi, on avait adopté des cocardes vertes, mais en réfléchissant que le vert était la couleur de la livrée de M. le comte d'Artois, on avait rejeté les cocardes vertes et l'on en avait pris de blanches, rouges et bleues, aux armes du Roi et de la ville. Tous les habitants de tout âge et de tout sexe portaient ces cocardes ; on en voyait porter aux magistrats, aux abbés, même à des moines et à des capucins " (20).
     
  20. J.-A. Creuzé-Latouche, Journal des Etats-Généraux, publié par Jean Marchand pour la Soc. de l'Hist. de France. Paris 1946.      
 

Le numéro 8 du Journal politique et national de l'abbé Sabatier de Castres, daté du 28 juillet 1789, dans un "résumé de ce qui s'est passé depuis le 27 juin jusqu'au 16 juillet", évoque également cette députation de l’Assemblée nationale envoyée à Paris le 15, et brosse l'effrayant tableau que les députés rapportèrent à Versailles. On y lit:
"On arborait partout la cocarde nationale; elle était blanche, bleue et rouge. Ces couleurs décoraient tout, consacraient tout, justifiaient tout."

     
 

 

Le 17 juillet, le Roi vient à Paris, accompagné de députés de l'Assemblée nationale. Déjà en temps ordinaires, une visite du Roi dans sa capitale faisait figure d'événement. Mais dans les circonstances présentes, la démarche royale marque le début d'une nouvelle époque : c'est un nouveau rapport entre le Roi et ses sujets que Louis XVI vient reconnaître.
Aussi, chacun arbore la cocarde, symbole de la nouvelle liberté, et la ville est pavoisée. D'après la Quinzaine Mémorable, des drapeaux de taffetas bleu, rouge et blanc brillent de toutes parts, et sont déployés pour la première fois. (p.88.)

     
  Le nouveau maire de la ville, Bailly, remet au Roi une cocarde, que celui-ci accepte, ce qui provoque l'enthousiasme de la population parisienne. Mais quelle était cette cocarde? Celle de la milice, bleue et rouge, ou celle de tous les citoyens, aux trois couleurs ? Ici encore, les témoignages sont divergents, et cette divergence explique bien des confusions, voire des manipulations dans l'histoire de la cocarde.  
Bailly
 
  Certains chroniqueurs ont dit que le Roi avait reçu la cocarde bleue et rouge, peut-être parce que, membres eux-mêmes de la milice et habitant des quartiers bourgeois, c'est celle qui leur était le plus familière. Mais il semble pourtant que le Roi reçut une cocarde aux trois couleurs : la Gazette de Leyde, dans son numéro du 24 juillet, reproduit une lettre de Paris du 17 juillet portant : "M. Bailly a présenté à Sa Majesté la cocarde royale et bourgeoise, réunissant les couleurs bleu, blanche et rose : le Roi a permis qu'on la mît sur son chapeau et l'a montrée au peuple."    
  Nous ne possédons pas le témoignage du Roi, mais nous avons celui de Bailly, dans ses Mémoires rédigés peu de temps avant sa mon. survenue en 1793 :
"Arrivé le premier à l'Hôtel-de-Ville, on me proposa de présenter au Roi la cocarde à trois couleurs que les Parisiens avaient prise depuis la Révolution, et pour se reconnaître. Je ne savais pas trop comment le Roi prendrait la chose, et s'il n 'y avait pas quelque inconvenance à cette proposition ; cependant il me parut que je devais présenter la cocarde, et que le Roi ne devait pas la refuser.
Quand le Roi descendit de voiture, je marchai près de lui, en le précédant de quelques pas, et je la lui présentai, en lui disant: "Sire, j'ai l'honneur d'offrir à Votre Majesté le signe distinctif des Français." Le Roi la prit de très bonne grâce et la joignit à son chapeau.
" (21).
 
Bailly
 
  21 Mémoires de Bailly, t. 2, p. 64.      
  Le député Adrien Duquesnoy écrivait tous les jours aux électeurs de son bailliage le rapport de ce qui s'était passé dans la journée. Le 17 au soir, de retour de Paris où il avait accompagné le Roi avec trois cents de ses collègues ("j'ai été toujours fort près de sa voiture, et je lui ai vu ou cru voir constamment l'air de la satisfaction"), il écrit:  
Adrien Duquesnoy
 
  "On sait que le peuple de Paris porte une cocarde rouge, bleue, blanche, pour montrer que les trois ordres sont unis; le peuple appelle cela être du tiers. Les plus honnêtes gens en portent maintenant ; toute la famille du comte de Crillon, sa femme, sa fille, en avaient avant-hier; le Roi en a reçu une ; quand nous le disions au peuple, il criait: "Bon! il est du tiers." (22).      
  22 Journal de Duquesnoy, tome, p 227.      
 

Un autre député, Jacques-Antoine Creuzé-Latouche, écrit dans son journal, déjà cité : "on lui a présenté une cocarde semblable à celle de tous les bourgeois". (p 243). Rappelons que le 15, il avait décrit la cocarde portée par les habitants de tout âge et de tout sexe comme étant: blanches, rouges et bleues (voir plus haut).

Les "Deux Amis de la liberté", dans leur histoire de la Révolution, parue en mai 1790, écrivent que le Roi reçut "la cocarde nationale, blanche, rose et bleue".

Quoi qu'il en soit. aucun témoignage contemporain ne peut accréditer de près ou de loin la formation de la nouvelle cocarde par l'adjonction de la cocarde bleue et rouge à la cocarde blanche du Roi, légende que l'on peut définitivement ranger dans le tiroir des fariboles historiques et autres contes pour amuser les petits enfants les après-midi de pluie...

     
         
       
  Diffusion dans le royaume
Les couleurs de l'insurrection connaîtront une diffusion rapide, elles seront arborées dans tout le pays ; pourtant, il semble qu'il n'y ait eu aucun texte qui ait fait connaître au pays, de façon officielle ou officieuse, la combinaison des trois couleurs, et c'est encore un nouveau mystère dans cette histoire qui n'en manque pas. Car, si l'on peut comprendre qu'à Paris, le 21 juillet, les femmes, à l'imitation des actrices des différents théâtres rouverts ce jour, portent sur leurs têtes des rubans bleus, rouges et blancs (la Quinzaine mémorable, p. 111), on ne s'explique pas comment la cocarde a pu être arborée à Alençon le 19 juillet, à Lille et à Beaune le 21, à Saint-Malo le 24 , à Boulogne-sur-Mer, à l'Île d'Oléron, à Aix-en-Provence le 25, à Metz et à Vienne en Dauphiné le 26,(23) sans qu'on puisse trouver de traces écrites qui décrivent le nouveau symbole à arborer. La propagation de la cocarde aurait été laissée au hasard des relations par diligence et messageries,... à moins qu'un réseau occulte de correspondance ait prévenu la nécessité d'une diffusion officielle. Il y a là encore matière à recherches.
     
  23 Lettre écrite d'Alençon le 19 juillet au rédacteur, Mercure de France du 8 août 1789, p. 141 ; lettre écrite de Lille le 31 juillet parue dans l'Esprit des Gazettes, 1ère semaine d'août 1789 ; Lettres du Docteur Rigby, p. 115 ; le Patriote français, 5 août 1789, p 4 ; Courrier de l'Escaut, 1789, p. 430 ; Mercure de France du 12 septembre 1789, p. 169; Courrier de Paris, n° IV, p.7 ; Affiches du Dauphiné, n° 14, p. 71.      
  Néanmoins, il semble qu'il y ait eu confusion aussi dans la diffusion de la cocarde, puisqu'à Rouen, les habitants auraient pris les armes et arboré une cocarde rose et blanche le 17 juillet, (24) les habitants de Vitry-le-François arborent le 20 juillet des cocardes bleues et rouges, et un voyageur anglais, le docteur Rigby, qui se trouvait à Paris le 14 juillet, constate à Macon le 23 juillet que les habitants arborent la cocarde patriotique, mais il remarque qu'elles y sont bleues et blanches.      
  24. Courrier de l'Escaut, p. 367.      
         
  A suivre : Le témoignage de Failly – Les couleurs du roi – Le rôle de La Fayette –      

 

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