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Dernière modification le 22 janvier 2007.

Bulletin de police du 27 juillet 1804

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Extrait de "La Police secrète du Premier Empire", Bulletins quotidiens adressés par Fouché à l'Empereur, 1804-1805, publiés par Ernest d'Hauterive, d'après les documents originaux inédits déposés aux Archives nationales. Paris, 1908.


  BULLETIN DU 8 THERMIDOR AN XII    Vendredi 27 juillet 1804.
 

66. - Bourse. - Les faits qui s'y sont passés, méritent de fixer l'attention de Sa Majesté. On doit d'autant plus compter sur l'exactitude des renseignements qu'ils sont puisés dans deux rapports faits par des observateurs absolument étrangers l'un à l'autre, et qui, néanmoins, se rencontrent avec une étonnante précision, dans ce qu'ils disent sur les opérations ayant eu lieu, sur les hommes qui les ont faites, ainsi que sur les résultats qui peuvent en être la suite. On s'attendait pour la Bourse du 7 à une hausse un peu marquée, parce que ce jour était le jour de rigueur à la livraison des rentes provenant de la liquidation du mois précédent, et que, la veille, le Syndicat avait fait afficher de fortes parties de rentes que des agents vendeurs étaient en retard à livrer. Le cours s'est ouvert à 59 fr. 70 et il a baissé subitement à 59 fr. 15 et, à minuit (?), il était tombé à 59 fr. 05. Les deux observateurs se réunissent pour annoncer que c'est moins encore cette baisse subite que la manière scandaleuse dont elle s'est opérée qui doit fixer l'attention. Depuis près d'un mois, une forte opération montée à la hausse attirait les regards des capitalistes, et la rente, partie de 57 fr. 50, était arrivée à 59 fr. 70, et la confiance dans l'effet se faisait remarquer surtout par beaucoup de petits placements de 200 francs et 400 francs. A la même époque, une espèce de coalition se monta contre la hausse. La presque totalité des agents bien connus pour jouer pour leur propre compte se réunirent. Les agents Ferrand, Bresson, Lorraine, Petit jeune, Boisson, Maunel, etc., et surtout l'agent de change Coindre, inondèrent la place de ventes à terme. Ce n'est pas sans quelque étonnement qu'on a vu Porteau qui, comme agent de la caisse d'amortissement, jouit d'une très grande influence, se réunir à ceux qui viennent d'être nommés, et vendre 60 à 80 mille livres de rentes, au moment où le cours s'élevait. Enfin les hommes qui voulaient la baisse avaient été obligés de céder à la confiance des acheteurs, et l'effet s'était maintenu contre toutes les intrigues. Le 7 était un jour décisif ; tous les moyens, toutes les intrigues ont été employés. Obligés de fournir les rentes qu'ils avaient vendues, les joueurs à la baisse avaient intérêt d'avoir à bon compte celles dont les noms étaient livrables de suite. Pour les obtenir à bon marché, il fallait éloigner les capitalistes de leur acquisition. Pour obtenir ce dernier résultat, ils ont offert la rente à terme, non seulement au même prix, mais encore à un prix inférieur à celui de la rente vendue au comptant. Les capitalistes qui, dans cette opération, avaient la rente à meilleur prix, en gardant leur argent, n'avaient aucun intérêt à approcher de la rente au comptant, qui leur aurait coûté plus cher et aurait exigé la livraison de leurs fonds, et conséquemment peu d'acheteurs ont demandé la rente au comptant. Par cette opération, outre ce résultat, les joueurs à la baisse en obtenaient un plus dangereux, ils jetaient l'épouvante parmi les propriétaires de rentes, forçaient les trembleurs à se défaire de leurs rentes, et se faisaient aider par eux dans les mouvements de baisse que les nouvelles ventes à terme, qu'ils venaient de faire, les mettaient dans la nécessité de provoquer et d'obtenir, à peine d'être ruinés.
Ces ventes à terme se sont toutes faites scandaleusement. Coindre, qui vend depuis un mois, voyant que les yeux se fixaient trop sur lui, n'a point voulu paraître pendant qu'on frappait le grand coup, et, après avoir donné le signal, il est disparu. En même temps que, de tous côtés à la fois, les coalisés offraient la rente, ils appelaient les vendeurs par des nouvelles qu'ils répandaient avec audace. On colportait une lettre de Martin Schwatz, du Havre, qui annonçait quatorze maisons détruites et plusieurs personnes tuées. On annonçait une grande perte devant Boulogne, et S. M. l'Empereur avait failli périr... On avait tiré un coup de pistolet à Sa Majesté, et la personne qui était à côté d'elle avait été tuée. L'agent de change Bresson répandait le bruit du départ de l'envoyé de Russie. L'agent de change Laffitte, qui se flatte de savoir tout ce qui se fait aux relations extérieures, parlait d’une demande en satisfaction faite par l'Empereur d'Allemagne et tellement exagérée qu'elle devait être suivie de la guerre, et mille autres nouvelles plus absurdes les unes que les autres. Les deux observateurs craignent que ce premier succès ne donne de la hardiesse aux joueurs à la baisse et ne leur procure une baisse plus marquée. Tous les deux pensent qu'il faut enfin en imposer aux agents de change, qui violent audacieusement la loi qui les a créés, jouent pour leur propre compte, et qu'un exemple, une suspension, une interdiction, ramèneraient ces agents à leur devoir, la tranquillité à la bourse, et la sécurité dans le cœur des capitalistes qui font des achats réels et dans le cœur des rentiers.

 
  67. - Nantes. Prêtres, Émigrés. - Le préfet de la Loire-Inférieure rapporte, à la date du 27 messidor: « Que les prêtres sont en général mal disposés et ennemis du gouvernement actuel, que les amnistiés sont plus réservés, mais doivent être observés. » Répondre de continuer une surveillance exacte, et d'en rendre compte.
   
 

 68. - Evénements divers.
Subsistances. L'augmentation du pain (un sol les 4 livres) eut lieu, dit-on, après une entrevue entre le syndic des boulangers et le préfet de police. A la préfecture, on a dit aux commissaires, non prévenus, de fermer les yeux. Le Ministre demande des explications au préfet.
Bertrand de Molleville (44), Inspecteur des jeux, détenu cinq mois. Informer sur ses propos qu'on cite, d'après une dénonciation anonyme.

 
 
  Ordres du Ministre. En liberté: Millet (lettre pour lui dans les papiers de l'agent anglais d'Abbeville) ; Kugel (colportage, pamphlets, défense d'en vendre). - En liberté en surveillance: Deymar (correspondance avec son frère l'abbé); Degain Montagnac (correspondance avec un agent du prétendant); Romangin (accusé de propos non tenus, mais mauvais renseignements) ; Mangiot (propos, ivre, bons renseignements) ; Liébaud (émigré amnistié : Guillard (suivait Sa Majesté à Boulogne ; enfermé comme fou). - Maintenus en détention: Quidor Duperray (ancien inspecteur de police. N'est pas sorti de l'Empire. Réclamé par le comte Dubuquois, chambellan de l'Empereur d'Allemagne) ; Rivoire (ancien officier de marine, détenu à Lourdes, donne des renseignements sur plusieurs individus) ; Gohin (22) ; Donzelle (beau-frère de Charles Bertin); Prijean (arrêté pour Prigent. Mauvais sujet. Demande à servir. Le mettre à la disposition du ministre de la guerre).
Livrées. Rennes. Des ex-nobles donnent une livrée semblable à l'uniforme des gardes forestiers. Faire cesser cet abus.

 
  Morin (10) fut condamné à mort avant la Révolution. Renseignements sur lui.
Mayenne. Amnistiés demandent des passeports : prudence.
Esprit public. Pas-de-Calais: unanimité pour le vote de l'hérédité. - Nancy : bon, la police se fait bien. – Toulon : Les partis divisés. Pamphlets et caricatures.
Bordeaux (8 et 19). Le jugement de Moreau a calmé les esprits. Par une lettre adressée à Levasseur et remise par erreur à un chef de bataillon du même nom, on apprend qu'à Bordeaux on engage des nègres pour Saint-Domingue.
Boulogne. Les individus signalés (60) n'ont pas paru.
Faits divers. Arrestation de Lepelletier, prêtre, pour faux billets (Manche). - Tentative d'assassinat dans l'Oise.

 

 

 

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