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Fezensac,
aide de camp du maréchal Berthier :
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Dans
les premiers jours de juillet, Napoléon se décida
à porter son quartier général en avant pour
suivre le mouvement de l'armée. Glubokoé, petite ville
à trente lieues de Wilna, dans la direction de Witepsk, lui
parut le point central le plus convenable. En effet, il pouvait
de là marcher avec une égale facilité sur le
camp de Drissa par la gauche, sur Minsk par la droite, et en avant
de lui sur la ligne d'opérations par laquelle les deux armées
russes pouvaient tenter encore leur réunion.
Les 4e et 6e corps et la garde impériale partirent successivement
de Wilna, pour suivre cette direction. L'empereur, devant faire
le trajet très rapidement, envoya d'avance presque tous les
officiers d'état-major.
Les aides
de camp du prince de Neuchâtel partirent de Wilna le 12 juillet,
et en cinq jours de marche, nous arrivâmes à Glubokoé.
Le pays que nous traversâmes était, en général,
beau et bien cultivé; les
villages, misérables comme tous ceux de Pologne et ravagés
par nos troupes. Nous rencontrâmes plusieurs régiments
de la jeune garde ; je remarquai entre autres le régiment
des flanqueurs, composé de très jeunes gens. Ce régiment
était parti de Saint-Denis, et n'avait eu de repos qu'un
jour à Mayence et un à Marienwerder sur la Vistule
; encore faisait-on faire l'exercice aux soldats les jours de marche,
après leur arrivée, parce que l'empereur ne les avait
pas trouvés assez instruits. Aussi ce régiment fut-il
le premier détruit ; déjà les soldats mouraient
d'épuisement sur les routes.
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Régiment
de flanqueurs
de la Garde (chasseurs) |
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D'après
le général de Ségur, le séjour prolongé
de Napoléon à Vilna pourrait s'expliquer par la fatigue
dont aurait souffert un homme prématurément vieilli. |
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Ceux
qui l'approchaient le plus se disaient entre eux que ce génie
si vaste, et toujours de plus en plus actif et audacieux, n'était
plus secondé, comme autrefois, par une vigoureuse constitution
; ils s'étonnaient de ne plus trouver leur chef insensible
aux ardeurs d'une température brûlante ; ils se montraient
l'un à l'autre avec regret le nouvel embonpoint dont son corps
était surchargé, signe précurseur d'un affaiblissement
prématuré.
Quelques-uns s'en prenaient à des bains dont il faisait un
fréquent usage. Ils ignoraient que, bien loin d'être
une habitude de mollesse, ils lui étaient d'un secours indispensable
contre une souffrance d'une nature grave et inquiétante (la
dysurie), que sa politique cachait avec soin, pour ne pas donner à
ses ennemis un cruel espoir. |
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Mais
le général de Caulaincourt,
qu'on peut cependant ranger au nombre de "ceux qui l'approchaient
le plus", n'a pas remarqué cet affaiblissement : |
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L'Empereur
fut d'une activité inconcevable pendant son séjour
à Wilna. Les nuits ajoutées aux jours ne lui suffisaient
pas. Aides de camp, officiers d'ordonnance, officiers d'état-major
couvraient les routes. Il attendait avec une impatience toujours
nouvelle les rapports des corps en marche. Sa première parole
à tous ceux qui arrivaient était toujours : «
— Combien a-t-on fait de prisonniers ? » Les escarmouches
étaient, à son grand regret, sans résultats.
Il se flattait, avec raison, que le prince d'Eckmuhl en viendrait
aux mains avec le prince Bagration et se réjouissait de voir
ce bras droit du vieux Souvarofî aux prises avec le plus tenace
de ses lieutenants. |
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VIe
Bulletin de la Grande Armée |
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Wilna,
le 12 juillet 1812.
Le
roi de Naples a continué à suivre l'arrière-garde
ennemie. Le 5, il a rencontré la cavalerie ennemie en position
sur la Dziana ; il l'a fait charger par la brigade de cavalerie
légère, que commande le général baron
Subervic. Les régiments prussiens, wurtembergeois et polonais
qui font partie de cette brigade, ont chargé avec la plus
grande intrépidité. Ils ont culbuté une ligne
de dragons et de hussards russes, et ont fait deux cents prisonniers,
hussards et dragons montés.
Arrivé au-delà de la Dzïana, l'ennemi coupa les
ponts et voulut défendre le passage. Le général
comte Montbrun fit alors avancer ses cinq batteries d'artillerie
légère, qui, pendant plusieurs heures, portèrent
le ravage dans les rangs ennemis. La perte des Russes a été
considérable.
Le général comte Sébastiani est arrivé
le même jour à Vidzoui, d'où l'empereur de Russie
était parti la veille. Notre avant-garde est sur la Dwina.
Le général comte Nansouty était le 5 juillet
à Postavoui. Il se porta, pour passer la Dziana, à
six lieues de là, sur la droite du roi de Naples. Le général
de brigade Roussel, avec le neuvième régiment de chevau-légers
polonais et le deuxième régiment de hussards prussiens,
passa la rivière, culbuta six escadrons russes, en sabra
un bon nombre et fit quarante-cinq prisonniers avec plusieurs officiers.
Le général Nansouty se loue de la conduite du général
Roussel, et cite avec éloge le lieutenant Borke, du deuxième
régiment de hussards prussiens, le sous-officier Krance,
et le hussard Lutze. S. M. a accordé la décoration
de la Légion-d'Honneur au général Roussel,
aux officiers et au sous-officier ci-dessus nommés.
Le général Nansouty a fait prisonniers cent trente
hussards et dragons russes montés.
Le 3 juillet, la communication a été ouverte entre
Grodno et Wilna par Lida. L'hetmann Platow, avec six mille cosaques,
chassé de Grodno, se présenta sur Lida, et y trouva
les avant-postes français. Il descendit sur Ivie le 5.
Le général comte Grouchy occupait Witchenew, Traboui
et Soubotnicki. Le général baron Pajol était
à Perckaï ; le général baron Bordesoult
était à Blakchtoui; le maréchal prince d'Eckmühl
était en avant de Bobrowitski, poussant des têtes de
colonne partout.
Platow se retira précipitamment, le 6, sur Nikolaew.
Le prince Bagration, parti dans les premiers jours de juillet de
Wolkowisk, pour se diriger sur Wilna, a été intercepté
dans sa route. Il est retourné sur ses pas pour gagner Minsk
; prévenu par le prince d'Eckmühl, il a changé
de direction, a renoncé à se porter sur la Dwina,
et se porte sur le Borysthène par Bobruisk, en traversant
les marais de la Bérésina.
Le maréchal prince d'Eckmühl est entré le 8 à
Minsk. Il y a trouvé des magasins considérables en
farine, en avoine, en effets d'habillement, etc. Bagration était
déjà arrivé à Novoi-Sworgiew ; se voyant
prévenu , il envoya l'ordre de brûler les magasins ;
mais le prince d'Eckmühl ne lui en a pas donné le temps.
Le roi de Westphalie était le 9 a Nowogrodek ; le général
Reynier, à Slonim. Des magasins, des voitures de bagages,
des pharmacies, des hommes isolés ou coupés tombent
à chaque moment dans nos mains. Les divisions russes errent
dans ces contrées sans directions prévues, poursuivies
partout, perdant leurs bagages, brûlant leurs magasins, détruisant
leur artillerie, et laissant leurs places sans défense.
Le général baron de Colbert a pris à Vileika
un magasin de trois mille quintaux de farine, de cent mille rations
de biscuit, etc. Il a trouvé aussi à Vileika une caisse
de vingt mille francs en monnaie de cuivre.
Tous ces avantages ne coûtent presque aucun homme à
l'armée française : depuis que la campagne est ouverte,
on compte à peine, dans tous les corps réunis, trente
hommes tués, une centaine de blessés et dix prisonniers,
tandis que nous avons déjà deux mille à deux
mille cinq cents prisonniers russes.
Le prince de Schwartzenberg a passé le Bug a Droghitschin,
a poursuivi l'ennemi dans ses différentes directions, et
s'est emparé de plusieurs voitures de bagages. Le prince
de Schwartzenberg se loue de l'accueil qu'il reçoit des habitants,
et de l'esprit de patriotisme qui anime ces contrées. Ainsi
dix jours après l'ouverture de la campagne, nos avant-postes
sont sur la Dwina. Presque toute la Lithuanie, ayant quatre millions
d'hommes de population, est conquise. Les mouvements de guerre ont
commencé au passage de la Vistule. Les projets de l'empereur
étaient dès lors démasqués, et il n'y
avait pas de temps a perdre pour leur exécution. Aussi l'armée
a-t-elle fait de fortes marches depuis le passage de ce fleuve,
pour se porter par des manœuvres sur la Dwina, car il y a plus loin
de la Vistule a la Dwina, que de la Dwina à Moscou et à
Pétersbourg.
Les Russes paraissent se concentrer sur Dunabourg ; ils annoncent
le projet de nous attendre et de nous livrer bataille avant de rentrer
dans leurs anciennes provinces, après avoir abandonné
sans combat la Pologne, comme s'ils étaient pressés
par la justice, et qu'ils voulussent restituer un pays mal acquis,
puisqu'il ne l'a été ni par les traités, ni
par le droit de conquête.
Le chaleur continue à être très forte.
Le peuple de Pologne s'émeut de tous côtés.
L'aigle blanche est arborée partout. Prêtres, nobles,
paysans, femmes, tous demandent l'indépendance de leur nation.
Les paysans sont extrêmement jaloux du bonheur des paysans
du grand-duché, qui sont libres; car, quoi qu'on dise, la
liberté est regardée par les Lithuaniens comme le
premier des biens. Les paysans s'expriment avec une vivacité
d'élocution qui ne semble pas devoir appartenir aux climats
du nord, et tous embrassent avec transport l'espérance que
la fin de la lutte sera le rétablissement de leur liberté.
Les paysans du grand-duché ont gagné à la liberté,
non qu'ils soient plus riches,mais que les propriétaires
sont obligés d'être modérés, justes et
humains, parce qu'autrement les paysans quitteront leurs terres
pour chercher de meilleurs propriétaires. Ainsi le noble
ne perd rien ; il est seulement obligé d'être juste,
et le paysan gagne beaucoup. Ç'a dû être une
douce jouissance pour le cœur de l'empereur, que d'être témoin,
en traversant le grand-duché, des transports de joie et de
reconnaissance qu'excite le bienfait de la liberté accordée
à quatre millions d'hommes. Six régiments d'infanterie
de nouvelle levée viennent d'être décrétés
en Lithuanie, et quatre régiments de cavalerie viennent d'être
offerts par la noblesse. |
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VIIIe
Bulletin de la Grande Armée,
Gloubokoé, le 22 juillet 1812. |
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Le
12, le général baron Pajol, étant a Jghoumen,
a envoyé le capitaine Vaudois, avec cinquante chevaux, à
Khaloui. Ce détachement a pris là un parc de deux
cents voitures du corps de Bagration, a fait prisonniers six officiers,
deux canonniers, trois cents hommes du train , et a pris huit cents
beaux chevaux d'artillerie. Le capitaine Vaudois, se trouvant éloigné
de quinze lieues de l'armée, n'a pas jugé pouvoir
amener ce convoi, et l'a brûlé; il a amené les
chevaux harnachés et les hommes.
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