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10 juillet 1812     11 juillet 1812    12 juillet 1812

 

     

L'Empereur est à Wilna (aujourd'hui Vilnius en Lituanie)

 
 
  Voir Journal de l'Empire du 27 juillet 1812.      

 

Faber du Faur, journal illustré esquissé sur les lieux pendant la campagne de Russie de 1812.

   
 

Aux environs de Kozusczina

le 11 juillet 1812.

L'armée avait passé le Niémen, pourvue de vivres pour vingt jours; car on avait espéré atteindre Wilna en combattant toujours et livrer près de cette ville une bataille décisive. De cette manière les transports de vivres auraient pu suivre les troupes et une victoire complète eût fait le reste. Mais la retraite continuelle des Russes reculait sans cesse la bataille. Faire halte pour attendre l'arrivée des convois, c'eût été renoncer à la probabilité d'empêcher, par une vive poursuite, la jonction des armées de Barclay de Tolly et de Bagration, et de pouvoir détruire ces deux armées l'une après l'autre. On suivit donc l'ennemi de près, et 400.000 hommes se virent, sans aucune provision de vivres, engagés, jour par jour, marche par marche, sur le sol d'un pays inhospitalier que venaient de dévaster et amis et ennemis, et qui avait eu peine à nourrir autrefois la poignée de Suédois conduits par Charles XII.
Ce fut surtout la grande colonne, sous les ordres immédiats de Napoléon, et dont le troisième corps d'armée faisait partie, qui eut le plus à souffrir. Elle suivait la grande route, où l'avant-garde française avait consumé tout ce que les Russes, dans leur retraite, n'avaient point détruit. Réduits à la nécessité de se procurer des vivres pendant la marche, les régiments érigèrent des détachements mobiles, que, chaque jour avant le départ, ils envoyaient du bivouac dans les villages situés à droite et à gauche de la route, et par où les troupes n'avaient point encore passé. Ces détachements avaient l'ordre d'enlever tout ce qu'ils pourraient trouver d'aliments, et, après avoir suivi les flancs de l'armée pendant quelques heures, ils devaient, autant que possible, rejoindre les régiments vers le soir. Pour mieux faire leurs courses, la plupart s'étaient procurés de petits chevaux russes, dont ils avaient fait leurs montures, et qui leur servaient en même temps de chevaux de somme, quand ils n'avaient pu trouver de voitures. Lorsque, le soir, on approchait de la place du bivouac, on voyait affluer de tous côtés ces cavaliers envoyés à la recherche qui, au lieu d'accompagner à pied leurs chevaux chargés de vivres, étaient le plus souvent perchés sur le bagage même.

     

 

D'après la Correspondance de Napoléon Ier (tome 24), quelques lettres écrites par l'Empereur ce 11 juillet 1812 :

   
 

Au Prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Vilna.

                Vilna, 11 juillet 1812.

Mon Cousin , répondez au roi de Westphalie que vous recevez avec étonnement sa lettre du 9 juillet à dix heures après midi; que l'ordre du 30 est positif; qu'on s'y exprime en ces termes : « Vous devez vous diriger sur Minsk. Le général Reynier, sans cependant perdre de vue de couvrir Varsovie, se dirigera sur Nesvije. » Ceci veut dire que le premier but du général Reynier doit être de couvrir Varsovie; que le second, si l'ennemi retirait toutes ses troupes de la Volhynie et qu'il n'y eût plus rien à craindre pour le Grand-Duché, serait de se diriger sur Nesvije. Mais, comme tous les faits tendent à prouver que l'ennemi a laissé deux divisions dans la Volhynie, il est convenable que le général Reynier ne perde pas de vue son principal but, qui est de couvrir Varsovie. Arrêtez donc son mouvement à Slonime. Le prince Schwarzenberg passera devant lui pour se porter d'abord sur Nesvije, et ensuite sur la Dvina. Que le général Reynier envoie des partis sur Pinsk, et se place en échelons de manière à tomber sur les flancs de tout ce qui voudrait déboucher sur Varsovie. Dans cette position, il rétrogradera sur Varsovie si ce pays est menacé; mais, tant que l'ennemi le saura sur les débouchés de Pinsk ayant des corps prêts à tomber sur ses flancs, et que d'ailleurs il aura à craindre notre entrée en Volhynie, il sera hors de mesure de se porter sur le territoire de Varsovie, et, s'il le faisait, ce ne serait pas impunément. Le général Reynier doit aussi renvoyer à Praga le régiment qui était destiné pour la garnison de cette place et qui en a été mal à propos ôté. La position du général Reynier sur les derrières est donc utile. Sa Majesté n'est pas surprise que vous ne compreniez pas que des instructions données à cent lieues de distance ont des buts opposés que les événements doivent éclaircir; mais ce dont elle se plaint, c'est qu'au lieu d'étudier ces instructions vous n'en teniez aucun compte. Pour couvrir le duché de Varsovie il n'est pas du tout nécessaire d'être sur le Bug, et, si cela était, le premier but du général Reynier étant de couvrir le duché, il aurait dû laisser des troupes sur le Bug, apprenant que l'ennemi avait laissé deux divisions en Volhynie. Mais comme vous n'étiez pas informé de ce que Bagration avait laissé en Volhynie, que vous ignoriez combien de divisions il avait avec lui, que vous ne vous êtes pas même mis à sa poursuite, et qu'il a pu faire sa retraite aussi tranquillement que s'il n'avait eu personne derrière lui ; tout cela étant à rebours des usages de la guerre, il n'est pas extraordinaire que tout soit de même. Le général Reynier, selon ce que l'ennemi aura laissé en Volhynie, est donc le maître, soit de retourner à Brzesc, soit de rester à Slonime, en envoyant des partis surPinsk. Mais le principal est, jusqu'à ce que l'ennemi ait retiré ses troupes de la Volhynie, qu'il laisse un corps d'observation à portée de couvrir Varsovie et de tomber sur tout ce qui, de la Volhynie, menacerait le duché et les derrières de l'armée. Donnez ordre au général Reynier d'écrire directement au major général et d'envoyer les renseignements qu'il a. Sa Majesté juge convenable que ce soit le général Reynier qui reste en observation pour garder le Grand-Duché , et non le prince Schwarzenberg; bien des raisons la déterminent sur cet objet. Le Roi doit faire connaître au prince Schwarzenberg que mon désir est qu'il se dirige, si Varsovie n'est pas imminemment menacée, sur Nesvije.


                                                                            Napoléon.

     

 

Au Prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Vilna.

Vilna, 11 juillet 1812.

Mon Cousin, donnez l'ordre ou duc deTrévise de partir demain à une heure du matin avec la division Delaborde, ayant huit pièces de canon, 600 chevaux de cavalerie légère de la Garde, chasseurs à cbeval, lanciers polonais et hollandais, commandés par le général Lefebvre-Desnoéttes. Il aura aussi avec lui tous les constructeurs de fours de la Garde, le parc du génie, composé d'une compagnie du train du génie, d'une compagnie de marins de la Garde, de plusieurs compagnies de mineurs et sapeurs, telles que le général Chasseloup en donnera le compte, et enfln d'une compagnie des ouvriers du Danube avec ses officiers. Il fera en sorte que tout cela se mette en route à trois heures du matin. Une heure après, il fera partir la division Roguet pour suivre son mouvement. Il se portera, par Lovarichki, Mikhalichki et Kobylnik, sur Gloubokoïé. Il aura soin que tout son monde ait des vivres à raison d'une demi-ration de pain, d'une once et demie ou deux onces de riz, et d'une livre de viande, pour le 12, le 13, le 14, le 15, le 16, le 17 et le 18. Le général Lefebvre-Desnoëttes gagnera deux jours avec sa cavalerie, un commissaire des guerres, les constructeurs de fours, une compagnie de sapeurs et un officier du génie, afin de construire douze fours à Gloubokoïé. Le commissaire des guerres fera sur-le-champ des réquisitions dans tous les environs, afin de réunir de la farine, du blé, des fourrages et de la viande, et d'assurer la subsistance des troupes. Une brigade de mon service léger suivra le duc de Trévise et sera sous ses ordres, avec un détachement de ma Maison, pour établir mon quartier général à Gloubokoïé. Le général Roguet aura également avec lui huit pièces d'artillerie. Vous donnerez l'ordre au duc de Danzig de faire partir demain pour Sventsiany la brigade de chasseurs à pied commandée par le général Curial, avec la batterie de huit pièces que j'ai attachée à cette brigade. Elle aura avec elle des vivres pour le 12, le 13, le 14, le 15, le 16, le 17 et le 18. La brigade de grenadiers à pied se tiendra prête à partir également pour Sventsiany, le 13 à une heure du matin, ayant aussi des vivres pour les 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 19. La cavalerie de la Garde commencera son mouvement demain, 12, pour se porter sur Sventsiany ; elle le continuera le 13. Un major de la Garde, avec 3 ou 400 chevaux, marchera avec le duc de Danzig. Le général Sorbier aura ordre de me remettre l'état de ses convois, en me faisant connaître les lieux où ils doivent arriver chaque soir; les têtes de ces convois ne passeront point Sventsiany. Le général Eblé me remettra l'état de l'équipage de pont, en me faisant également connaître le lieu où il arrive chaque jour; il ne dépassera pas non plus Sventsiany. Le général Kirgener aura ordre de me remettre l'état du parc, et ne dépassera pas non plus Sventsiany. On dressera un tableau en règle de tout ce mouvement, et il me sera remis. Vous donnerez des ordres pour établir, le plus promptement possible, la route de Sventsiany à Gloubokoïé, en mettant à chaque marche un détachement d'infanterie et un petit détachement de cavalerie, et en y assurant les postes. Le grand écuyer fera placer l'estafette sur la route de Vilna à Sventsiany, et sur celle de Sventsiany à Gloubokoïé; cependant ce mouvement ne sera démasqué au delà de Sventsiany que le 14, de sorte que les relais n'arrivent à Postavy que le 15 et à Gloubokoïé que le 16. Il me sera rendu compte, jour par jour, de la marche de ces colonnes sur les deux routes de Gloubokoïé, par Sventsiany et Mikhalichki. Le petit quartier général, avec les convois qui sont à la suite, arrivera à Sventsiany le 13, et se reposera le 14, de manière à pouvoir être le 17 ou le 16 à Gloubokoïé, s'il en reçoit l'ordre. Il sera nommé sur-le-champ un officier d’état-major pour se rendre avec le général Lefebvre-Desnoëttes à Gloubokoïé, dont il prendra le commandement. Il sera envoyé une escouade de gendarmerie pour maintenir l'ordre sur les derrières du corps du duc de Trévise. On mettra à l'ordre de ce corps qu'on doit marcher en ordre et ne point piller, et que les traîneurs seront arrêtés et fusillés.

Napoléon

     

 


  12 juillet 1812  

 

 

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