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Lebreton
(André-François), libraire, né à Paris
en août 1708, et mort le 5 octobre 1779, était fils
d’un conseiller en l’élection de Paris, et petit-fils maternel
de Laurent d’Houry, imprimeur et fondateur de l’Almanach royal
en 1683. Lebreton est surtout connu par la part qu’il a eue
à la publication de l’Encyclopédie. L’ouvrage
fut commencé en 1751 ; et sept volumes avaient déjà
été mis au jour lorsque l’impression fut suspendue
en 1759, par un ordre de l’autorité, justement mécontente
de l’esprit et des maximes répandus dans ce fameux dictionnaire
; mas les encyclopédistes se plaignirent si haut, et firent
intervenir tant de protecteurs, qu’ils obtinrent de continuer, à
condition que les volumes suivants paraîtraient venir de l’étranger.
Voilà pourquoi ils portent le titre de Neufchâtel,
quoiqu’ils fussent imprimés à Paris chez Lebreton.
Celui-ci, effrayé de ces contradictions et de l’audace toujours
croissante de Diderot, qui n’était plus retenu par aucune
censure, revoyait les épreuves que ce philosophe et ses collaborateurs
avaient corrigées, et ne les livrait à l’impression
qu’après avoir supprimé ou adouci ce qui lui paraissait
trop fort. Diderot fut assez longtemps à s’en apercevoir
: mais quand il l’eût découvert, sa colère fut
extrême ; et ce fut alors (janvier 1771) qu’il écrivit
à Lebreton une lettre où il exhale son ressentiment.
Il lui disait entre autres : « Vous avez oublié que
ce n’est pas aux choses courantes et communes que vous devez vos
premiers succès ; qu’il n’y a peut-être pas un homme
dans la société qui se soit donné la peine
de lire dans l’Encyclopédie un mot de géographie,
de mathématiques ou d’arts, et que ce que l’on y recherche
c’est la philosophie ferme et hardie de quelques-uns de vos travailleurs
(1). » Cette naïveté de Diderot prouve qu’on ne
l’avait pas mal jugé quand on avait dit que l’Encyclopédie
n’était pour lui qu’un moyen de propager ses opinions philosophiques
: l’intérêt des sciences, qu’il faisait valoir tout
haut, n’était au fond à ses yeux qu’un accessoire
sans conséquence. Les lecteurs ne jugeront pas sûrement
Lebreton aussi sévèrement que le faisait Diderot,
pour des retranchements qui, au reste, n’empêchent pas l’Encyclopédie
de renfermer encore bien des choses répréhensibles.
Lebreton devint juge-consul, syndic de sa corporation, et premier
imprimeur du roi.
P –c–T.
(1) Cette lettre, dont l’original est entre les mains
des héritiers de Lebreton, est insérée dans
la Correspondance de Grimm, tome VII, pag. 308. |
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