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Amiot
(Le Père), jésuite français, de la mission
de Pékin, né à Toulon , en 1718. Les trente
dernières années du siècle qui vient de s'écouler
ont été celles où nos connaissances sur la
Chine ont fait le plus de progrès. Les missionnaires, dans
cet intervalle de temps, se sont empressés de répondre
à une foule de questions qui leur ont été faites
d'Europe. Parmi eux, se distingua le P. Amiot, et c'est à
lui surtout que nous devons les renseignements les plus exacts et
les plus étendus sur les antiquités, l'histoire, la
langue et les arts des Chinois. Ce jésuite arriva à
Macao en 1750, et à Pékin, où il fut bientôt
appelé par les ordres de l'empereur, le 22 août 1751
: il ne quitta plus cette capitale jusqu'à sa mort. Ce missionnaire,
outre le zèle qui le conduisit à la Chine, y porta
des connaissances sur toutes les parties de la physique et des mathématiques,
des talents pour la musique, un esprit juste, une mémoire
heureuse, et une infatigable ardeur pour le travail. Une étude
opiniâtre lui rendit bientôt familières les langues
chinoise et tatare, et, muni de cette double clef, il puisa dans
les livres, anciens et modernes, des notions saines et vraies de
l'histoire, des sciences, et de toute la littérature de la
Chine. Les fruits de tant d'études et de travaux ont été
recueillis par la France, où le P. Amiot n'a pas cessé
de faire passer, soit des ouvrages, soit un grand nombre de mémoires.
Nous lui devons : I. Eloge de la ville de Moukden, poème
chinois , composé par l'empereur Kien-long, traduit en français,
Paris, veuve Tilliard ,1770, in-8°., fig. ; le traducteur
a joint à sa version un grand nombre de notes historiques
et géographiques sur la ville et la contrée de Moukden,
ancienne patrie des Tatars-Mantcheoux , aujourd'hui maîtres
de la Chine ; II. Art militaire des Chinois, Paris, Didot,
1772, in-4°., fig. Comme l'édition de cet ouvrage était
épuisée depuis longtemps, on l'a fait réimprimer
dans le tome VII des Mémoires sur les Chinois, et
l'on trouve, dans le tome VIII de ces mêmes Mémoires,
un Supplément avec figures, envoyé postérieurement
de la Chine par le P. Amiot. Les Chinois comptent six ouvrages classiques
ou king sur l'art militaire, et chaque guerrier qui aspire
aux grades doit subir un examen sur ces livres. Le P. Amiot n'a
traduit que les trois premiers, avec quelques fragments du quatrième,
parce qu'ils contiennent toute la doctrine des Chinois sur la guerre.
III. Lettre sur les Caractères chinois, adressée
à la société royale de Londres, et insérée
dans le tome I des Mémoires sur les Chinois. Le
célèbre Needham crut trouver, sur un buste d'Isis,
conservé à Turin dans le cabinet du roi, des caractères
égyptiens, qu'il disait être très ressemblants
à ceux des Chinois. Cette découverte prétendue
fut publiée dans toute l’Europe, et divisa les savants. La
société royale de Londres prit le parti d'envoyer
les Mémoires de Needham aux Jésuites de la Chine,
en les priant de juger la question. Ceux-ci confièrent au
P. Amiot le soin de rédiger la réponse, et ce savant
missionnaire décida que les caractères, gravés
sur l'Isis de Turin, n'avaient aucun trait de ressemblance avec
ceux de la Chine. Cette lettre, qui est une analyse savante de la
langue et des caractères chinois, obtint tous les suffrages,
même celui de Needham. IV. De la Musique des Chinois,
tant anciens que modernes, ouvrage considérable, qui
occupe la plus grande partie du tome VI des Mémoires.
Feu M. l'abbé Roussier, si connu par ses profondes connaissances
en musique, a non seulement suivi l'impression de cet écrit,
mais il en a vérifié les calculs, et y a joint des
notes et des observations. V. Vie de Confucius, histoire
la plus exacte de ce célèbre philosophe, et dont tous
les matériaux ont été puisés dans les
sources chinoises les plus authentiques. L'auteur y a joint la longue
suite des ancêtres de Confucius, et celle de ses descendants,
qui subsistent encore à la Chine ; généalogie
unique dans le monde, puisqu'elle embrasse plus de quarante siècles.
Cette vie, ornée de figures, gravées d'après
les dessins chinois, occupe presque la totalité du tome XII
des Mémoires sur les Chinois ; VI. Dictionnaire tatar-mantcheou-français,
Paris, Didot ainé, 1789, 5 vol. in-4° ; ouvrage
précieux et qui manquait à l'Europe, où cette
langue était totalement ignorée. On doit la publication
de ce Dictionnaire à feu M. Bertin, ministre, amateur zélé
des arts et des sciences de la Chine. Il fit graver les poinçons,
et fondre, à ses frais, les caractères nécessaires
pour son impression, et, par un choix éclairé que
le succès a pleinement justifié, il en confia l'édition
à M. Langlès, savant distingué, et connu surtout
par une profonde connaissance des langues orientales. Le P. Amiot
avait aussi envoyé une Grammaire abrégée de
la langue tatare-mantcheou ; on la trouve imprimée dans le
tome XIII des Mémoires. Tous les ouvrages que nous
venons d'indiquer ne sont encore qu'une partie des intéressants
écrits que nous devons à ce savant et laborieux missionnaire,
le reste, sous la forme de lettres, d’observations et de mémoires,
se trouve répandu avec profusion dans les 15 volumes in-4°
des Mémoires concernant l'histoire, les sciences et les
arts des Chinois. Ceux qui voudront connaître avec plus
de précision ce qui lui appartient dans cette utile collection,
peuvent consulter l'article Amiot de la Table générale,
qui se trouve dans le tome X : ils verront, sans doute avec quelque
étonnement, que cette nomenclature seule occupe quatorze
colonnes de cette table, laquelle cependant ne contient encore que
les matières des dix premiers volumes. Le P. Amiot, devenu
si justement célèbre en Europe, loin de laquelle il
a passé la plus grande partie de sa vie, est mort à
Pékin, en 1794 , âgé de 77 ans. G—R.
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Chine
Science
militaire des Chinois, par le père Amiot (1773)
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