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Mameloucks

 

Bardin, Dictionnaire de l'Armée de terre, 3286-3288.

 
 

Les Mameloucks sont nés au pied du Caucase ; ils furent introduits en Égypte par la désastreuse irruption des Mogols en 1227.
En 1230, le Sultan, pour recruter cette troupe, fit acheter en Circassie douze mille jeunes garçons. Elle devient un corps privilégié et fait la loi à ses maîtres. En 1250, cette garde prétorienne égorge le Sultan et en élit un autre. C'était l'époque des désastres de Louis Neuf, désastres auxquels la malhabileté de ce prince n'a pas moins contribué que la valeur des Mameloucks qui écrasèrent son armée à Massoure.
D'esclave devenue despote, cette soldatesque féodale, en révolte contre son souverain, a tenu l’Égypte sous un joug de fer.
En 1517, Soliman leur enlève la possession de l'Egypte, et les raye presque de la milice turque ; leur nom est comme oublié pendant deux cent trente ans, et jusqu'au tiers du dix-huitième siècle ; ils reparaissent alors avec éclat.
Vingt-quatre beys ou chefs de province tirés du corps des Mameloucks sont les seigneurs du pays et les généraux des troupes ; devenus propriétaires puissants, ils se regardent comme indépendants de la Porte, accroissent le nombre des Mameloucks et dominent despotiquement le pays. Le pacha turc entretenu triennalement au Caire était plutôt le prisonnier des Beys que le représentant du grand Sultan.
Pendant plus de cinq siècles, les Mameloucks n'ont subsisté qu'en se recrutant aux bords du Phase et en Circassie ; ils ont dédaigné de s'allier à des femmes indigènes, ils n'ont jamais produit de lignée qui ait traversé deux générations, et leurs enfants mâles ne devenaient point Mameloucks.
Chacun de ces cavaliers avait un ou deux fellahs ou esclaves à pied ; ce servage était une trace du primitif service des fantassins.
Parmi les Beys, se faisant presque toujours la guerre, le plus brave, ou le plus heureux, était le plus puissant ; l'armée de chacun d'eux était de cinq à six cents Mameloucks, dont le chef était en même temps le propriétaire ; quelquefois l'hérédité, plus souvent l'élévation d'un Mamelouck favori, perpétuait la classe des Beys. A l'arrivée des Français, deux Beys s'étaient, pour ainsi dire, partagé la souveraineté ; l'un à la tête des choses de la guerre, l'autre à la tête des choses civiles ; c'étaient le politique Ibrahim et le sabreur Mourad.
Les Mameloucks ont été détruits en partie, en 1815, par le vice-roi d'Egypte ; une grande partie de cette soldatesque est pourtant restée sur pied, mais a été répartie par ce prince sur des points éloignés. Il a craint d'affaiblir les qualités de cette cavalerie s'il l'eût constituée sur le pied européen. (...)
Volney faisait des Mameloucks de l'autre siècle un portrait peu à leur avantage ; ignorants et superstitieux par éducation, ils deviennent farouches par les meurtres, séditieux par tes tumultes, perfides par les cabales, lâches par dissimulation et corrompus par toute espèce de débauches.
Suivant plusieurs relations, la force numérique des Mameloucks n'a jamais dépassé de beaucoup sept mille soldats ; leur nombre, en y comprenant les beys, les kachefs, les affranchis, les esclaves, les jeunes gens au dessous de vingt ans, peut s'être élevé à neuf mille hommes ; Volney les évaluait, en 1785, à dix mille cavaliers ordonnés en sept corps ou agrégations. On regarde en général cette quantité comme le maximum des forces que les vingt-quatre beys aient tenues sons les armes. Cependant M. Thiers les évalue à douze mille cavaliers.
Dans sa relation de la campagne d'Egypte, Berthier fait mention de quatre mille Mameloucks qui combattirent à Chebris ; il en accuse six mille à la bataille des Pyramides.
Les Mameloucks étaient distingués par un habillement splendide et un riche harnachement à l'orientale et à selle d'armes : le djérid ou arzegaie était, dans leur main, une arme terrible ; ils avaient une espingole anglaise, plusieurs pistolets de ceinture, une masse d'armes, un poignard ou yatagan, un sabre dont la lame, longue de deux pieds mesurée en ligne droite, avait trente pouces de développement ; le sabre courbe des hussards en était une imitation.
Ils avaient pour instrument de musique des tam-tams.
Ils ne connaissaient rien, dit Volney, de notre art militaire ; ils n'avaient ni uniforme, ni discipline, ni subordination, leur réunion est un attroupement, leur marche une cohue, leur combat un duel, leur guerre un brigandage.
Bonaparte en concevait une idée plus haute ; il a dit : Les Mameloucks, dans tout l'Orient (M. Las-Cases, t. v, p. 192), étaient des objets de vénération et de terreur ; c'était une milice regardée jusqu'à nous comme invincible. Deux Mameloucks tenaient tête à trois Français, parce qu'ils étaient mieux armés, mieux montés, mieux exercés ; ils avaient deux paires de pistolets, un tromblon, une carabine, un casque avec visière, une cotte de mailles, plusieurs chevaux et plusieurs hommes de pied pour les servir. Mais cent cavaliers français ne craignaient pas cent Mameloucks ; trois cents étaient vainqueurs d'un pareil nombre ; mille en battaient quinze cents ; tant est grande l'influence de la tactique, de l'ordre et des évolutions ! Murat, Leclerc, Lassalle, se présentaient aux Mameloucks sur plusieurs lignes, lorsque ceux-ci étaient sur le point de déborder la première, la seconde se portait à son secours par la droite et par la gauche ; les Mameloucks s’arrêtaient alors, et convergeaient pour tourner les ailes de cette nouvelle ligne ; c'était le moment qu'on saisissait pour les charger ; ils étaient toujours rompus.
Avec cette poignée choisie (ibid., t. v, p. 102), et la canaille recrutée sur les lieux, pour être dépensée au besoin (nous recommandons aux observateurs cette phrase sur le commun des soldats), je ne connais rien que je n'eusse renversé, Alger en trembla. —
La réputation des Mameloucks a fait naufrage devant les carrés français ; notre infanterie a bravé les charges de cette cavalerie foudroyante : elle leur a enlevé en 1798 l'Egypte ; en 1811, l'infanterie albanaise les a assassinés, elle a anéanti leur corporation.

 
 

 

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