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Cirque
Olympique. Peu de spectacles, assurément, ont autant
voyagé dans Paris et changé de salles et de quartiers
que celui-ci. Son origine remonte à l'année 1780.
Ce fut alors que l'écuyer anglais Astley vint ouvrir dans
la capitale, rue du Faubourg-du-Temple, un établissement
portant le simple nom de Manège, et destiné aux exercices
d'équitation. La nouveauté de ces représentations
piqua la curiosité parisienne, et les chevaux d'Astley firent
fortune. Deux ou trois ans après, il trouva un nouvel élément
de succès dans son association avec Franconi père,
non moins habile que lui dans l'art de faire servir à nos
plaisirs l'animal qui déjà nous était si utile.
Le manège prit alors le nom moins vulgaire d'Amphithéâtre
; mais au bout de quelque temps il y eut scission entre les deux
associés, et Franconi transporta à Lyon son industrie
équestre.
Astley ayant quitté Paris peu après la révolution,
son ancien collègue y revint en 1792,
et depuis ce temps, lui et sa famille y ont seuls exploité
ce genre de spectacle. En 1802
il fit construire un nouvel amphithéâtre sur l'emplacement
de l'ancien jardin des Capucines (entre le boulevard et la place
Vendôme), où plusieurs petits théâtres
et une ménagerie avaient remplacé l'asile des pieuses
nonnes. La création de la belle rue de la Paix, sur ce terrain,
en expulsa à leur tour ces divers établissements.
Les deux frères Franconi, qui avaient succédé
à leur père devenu aveugle, fondèrent alors,
rue Saint-Honoré, près les Tuileries, un théâtre
plus vaste; il fut ouvert à la fin de 1807. Un de nos spectacles
avait pris le nom grec d'Odéon : ils empruntèrent
à l'antiquité le titre pompeux de Cirque olympique.
S'ils ne pouvaient le justifier tout à fait en reproduisant
pour nous ces fêtes célèbres auxquelles Olympe
voyait assister la Grèce entière, du moins y introduisirent-ils
à cette époque la pantomime, qui avait aussi joui
d'une grande faveur chez les peuples anciens.
Les talents des deux frères et de mesdames Franconi dans
ce double genre assurèrent à leur entreprise une grande,
prospérité. Elle s'accrut encore quand ces habiles
instituteurs de coursiers produisirent sur leur scène deux
élèves plus étonnants sans doute, l’éléphant
Baba et le cerf Coco.- Mais en en 1816, des précautions nécessaires
pour la sûreté du grand bâtiment de la rue de
Rivoli , où venaient s'installer le ministère des
finances et le trésor public, exigèrent des directeurs
du Cirque un nouveau déménagement, et une salle rapidement
bâtie rue du Faubourg-du-Temple les reçut dans leur
ancien quartier , où les suivit la faveur publique. Un témoignage
bien flatteur leur en fut donné, quand cette salle fut détruite
par un incendie en 1826 : de nombreuses souscriptions vinrent les
aider à réparer leurs pertes et à construire
le superbe Cirque où ce spectacle a été transféré,
sur le boulevard du Temple. C'est, après l'Opéra,
le vaisseau dramatique la plus vaste de la capitale : il contient
plus de 1800 spectateurs.
L'administration qui a succédé aux frères Franconi
et dans laquelle se trouve encore un héritier de ce nom,
a mis à profit les dimensions étendues de son théâtre.
Elle a pu y entourer de toute la pompe, de tout l'éclat nécessaires,
ces grands tableaux empruntés surtout à l'histoire
de Napoléon, et qui ont pendant longtemps attiré l'affluence
par le luxe de leur mise en scène, la beauté et le
grand nombre de leurs décors.
Même avant la révolution de 1830, qui émancipa
nos théâtres, le Cirque olympique avait obtenu la parole,
et ses pantomimes dialoguées prirent alors le nom de mimodrames.
Toutefois le vaudeville et la comédie n'ont pu s'y acclimater:
ils y avaient de trop faibles interprètes; mais dans le mimodrame
la médiocrité des acteurs parlants est amplement compensée
par les causes d'attraction pour la foule dont nous avons parlé
plus haut. Quant aux exercices d'équitation, depuis la retraite
des frères Franconi, ils ne font plus guère que le
prologue de la représentation.
Le Cirque olympique a encore une autre spécialité
: il offre une hospitalité temporaire à ces divers
genres de spectacles parlant aux yeux, qui viennent de temps en
temps varier les distractions et les amusements de la grande ville.
C'est ainsi que nous y avons vu tour à tour les jongleurs
indiens et les Alcides français, Martin avec ses lions et
ses tigres dociles etc., etc., Cette ressource est précieuse
pour une entreprise où l'abondance des recettes aura toujours
peine à couvrir l'énormité des dépenses.
Du reste, l'administration du Cirque olympique a établi cette
année (1836) une succursale aux Champs-Ëlysées:
c'est au carré Marigny qu'a été construit avec
des planches et des toiles ce Cirque d'été, où
l'on n'aura point à craindre la brûlante température
de nos spectacles dans cette saison. La réussite des concerts
en plein vent a sans, doute inspiré l'idée de cette
spéculation qui s’adresse à deux besoins du siècle,
ceux du plaisir et du confortable. |
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