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NAPPER-TANDY
(James), patriote irlandais, naquit dans cette contrée vers
1756, et fut de bonne heure vivement affecté des malheurs
de sa patrie, qu'il brûlait du désir de replacer au
rang des nations indépendantes. Il s'occupait de ses projets,
lorsque la révolution française éclata; il
l'adopta avec enthousiasme, espérant y trouver les moyens
de parvenir à son but, et dès 1791 il publia, au nom
des Irlandais-unis, un plan des réformes qu'il jugeait nécessaires
pour rendre son pays à la liberté. Ses principes politiques
firent oublier ses principes religieux, et, quoique protestant non
conformiste, il fut nommé secrétaire d'une association
de catholiques romains à Dublin; le cabinet de Londres ne
vit pas d'un œil indifférent ces commencements d'insurrection;
il dirigea des poursuites contre Napper-Tandy, qui, pour s'y soustraire,
se réfugia en France. Aussitôt son arrivée à
Paris, il se hâte de réunir chez lui les réfugiés
qui partageaient ses opinions et ses vues, et se présente
ensuite au directoire-exécutif, qui l'accueille avec bienveillance,
le nomme général de brigade au service de France,
et lui accorde les secours qu'il réclame. Dès ce moment,
Napper-Tandy commence à jouer un rôle politique; il
part pour l'Irlande, où il débarque au mois d'août
1798, avec des troupes françaises, sur la côte occidentale
de Donegal. Il adresse aussitôt une proclamation aux Irlandais-unis
pour les appeler à l'indépendance; mais, avec de si
faibles moyens il voulut exécuter de trop vastes projets,
et tenta le sort des armes, qui ne lui fut pas favorable: les troupes
qu'il avait amenées en petit nombre furent battues et dispersées,
et lui-même, forcé de s'échapper sur un brick
français, alla débarquer à Hambourg, pour repasser
en France ; il fut arrêté dans cette ville, avec un
des frères Oconnor, sur la réquisition de Crawfort,
ministre d'Angleterre ; tous deux avaient été exceptés,
par les deux chambres d'Irlande, du bill d'amnistie.
Des prétentions opposées sur la personne de Napper-Tandy
s'élevèrent alors entre l'Angleterre et le directoire-exécutif
français; tous deux réclamaient également l'extradition
du prisonnier, la France par un motif d'humanité. Le sénat
de Hambourg, pressé par deux gouvernements qu'il a lieu de
craindre, se trouvait dans une position extrêmement embarrassante;
en se décidant contre la France, le parti était moins
honorable, mais moins dangereux pour le moment, et c'est celui auquel
il s'arrêta; les deux Irlandais furent livrés à
une escadre anglaise qui était venue appuyer par la terreur
les menaces de son gouvernement. Le général en chef
Bonaparte, devenu premier consul, écrivit à l'occasion
de cet événement au sénat de Hambourg; sa lettre,
pleine de force et de dignité, renfermait ces mots remarquables
qui ont retenti dans toute l'Europe: « Le courage et l'énergie
maintiennent les états ; c'est la lâcheté qui
les renverse. » Napper-Tandy fut transporté dans les
prisons d'Irlande, et mis en jugement en mai 1800; la cour du banc
du roi devant laquelle il comparut le condamna à mort ; mais
l'exécution fut différée à cause sans
doute des réclamations de la France. Enfermé à
Dublin, il y attendit pendant deux ans la mort ou la liberté
; enfin il vit briser ses fers par l'intercession du gouvernement
français, sur la demande adressée par M. Otto à
M. Hawkesbury, et fut sur-le-champ renvoyé en France. Les
précautions que l'on prit pour l'éloigner, parurent
annoncer qu'on attachait de l'importance à sa personne: la
voiture dans laquelle il monta au sortir de sa prison était
escortée par un détachement de cavalerie ; il fut
expressément interdit au prisonnier de communiquer avec qui
que ce fût ; on évita avec soin de traverser les grandes
villes qui se rencontraient sur la route, jusqu'à Wicklow,
où on le fit embarquer pour Bordeaux, en mars 1802 ; il arriva
dans ce port, le 21 du même mois, après huit jours
de traversée. Il fut accueilli avec transport par les réfugiés
irlandais qui s'y trouvaient et qui célébrèrent
en son honneur un banquet civique ; Napper-Tandy y porta un toast
aux amis de la liberté de tous les pays; il mourut dans le
courant de 1805.
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