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Marchena

 

  Mahul (Alphonse), Annuaire nécrologique pour 1822.    
 

MARCHENA (Joseph), littérateur espagnol, né vers 1770, à Utrera en Andalousie, fit de bonnes études et se destina à l'état ecclésiastique. Une supériorité d'esprit assez remarquable, le désir d'acquérir de nouvelles connaissances, lui firent rechercher avec avidité les ouvrages philosophiques prohibés en Espagne. Il y puisa des opinions contraires à la religion catholique, et se permit de les manifester assez haut pour éveiller l'attention des inquisiteurs. Des amis le prévinrent au moment même où il devait être arrêté, et il eut à peine le temps de se sauver en France. La Révolution venait d'y éclater : il en embrassa les principes avec toute la fougue de son âge et de son caractère, excitée encore par la persécution à laquelle il venait d'échapper. Après quelque séjour à Bayonne, Marchena se rendit à Paris. Versé dans la connaissance des langues et de la littérature ancienne, doué d'une mémoire et d'une facilité prodigieuses, il déploya une capacité qui le fit bien accueillir de plusieurs hommes influents. Il s'attacha notamment à Brissot et au parti Girondin, ce qui le fit arrêter à Bordeaux, après le 31 mai, et conduire à Paris, où il fut emprisonné. Les écrits virulents qu'il publia de sa prison, et ses réclamations énergiques ne purent lui faire obtenir la palme de martyr de la liberté, qu'il sollicita à plusieurs reprises : le 9 thermidor ouvrit les portes de sa prison. C'est après cette époque qu'il obtint une place dans les bureaux du Comité de salut public, en même temps qu'il coopérait à la rédaction de l'Ami des lois, journal du député Poultier ; mais le parti thermidorien s'étant divisé en deux sections, Marchena s'attacha à celle qui perdit sa prépondérance en août 1795, parce qu'elle ne voulut pas rétrograder dans les voies de réparation ; et il se vit privé presque en même temps de sa place au Comité et de son travail au journal. Il s'occupa alors à rédiger des pamphlets politiques, dirigés principalement contre Tallien, Legendre et Fréron, chefs du parti victorieux ; ceux-ci, fatigués de ses attaques, le dénoncèrent à l'époque du 13 vendémiaire (5 octobre 1795), comme un des agitateurs des sections de Paris, et le firent proscrire par suite de cette journée. Quoiqu'il appartînt au parti républicain, il se récriait vivement contre les injustices de l'époque, en même temps qu'il écrivait contre les royalistes. Ce système déplut au Directoire qui, après l'amnistie, voulut une seconde fois le proscrire comme royaliste, en lui appliquant, en juin 1797, la loi du 21 floréal contre les étrangers ; et en conséquence le fit conduire de brigade en brigade hors des frontières. Marchena adressa de la Suisse, une pétition au Conseil des Cinq-Cents pour réclamer la continuation de la jouissance des droits de citoyen français, qui ne lui étaient pas contestés depuis cinq années. Le Corps Législatif, alors opposé au Directoire, fit droit à sa réclamation, et il rentra en France.
En 1801, Marchena fut attaché à l'administration de l'armée du Rhin, comme secrétaire du général en chef Moreau. Il y faisait l'amusement de l'état-major, par sa manie de vouloir faire croire que les plus belles femmes étaient éprises de lui, ce qui lui attira beaucoup de lettres supposées, écrites par les aides de camp du général. Ses prétentions en ce genre étaient d'autant plus ridicules, qu'avec une taille de quatre pieds huit pouces, l'ensemble de sa personne présentait l'image d'une véritable caricature. Chargé de travailler sur la statistique de diverses contrées de l'Allemagne, Marchena se mit à étudier la langue allemande qu'il ne connaissait pas, et parvint à l'apprendre en peu de jours. Il lut alors les meilleurs ouvrages de statistique qui existent dans cette langue, et composa de leurs extraits, et de ses propres observations, un travail que les généraux, qui eurent occasion de le consulter, trouvèrent bien fait et d'une grande utilité. Revenu à Paris aussi pauvre qu'il en était sorti, Marchena y continua de rester auprès de Moreau en qualité de secrétaire, et témoigna beaucoup de fidélité à ce gl à l'époque de ses malheurs.
Après son départ pour l'exil, Marchena vécut dans l'obscurité jusqu'à l'époque de la première invasion des Français en Espagne. On vint le chercher pour l'employer comme journaliste et agent. Il partit avec l'armée ; et après avoir erré quelque temps dans les camps, le gouvernement de Joseph le nomma chef d'une division du ministère de l'intérieur ; en même temps il rédigeait un journal en faveur du nouveau système et faisait jouer sur les théâtres de Madrid ses traductions espagnoles du Tartufe et du Misanthrope, qui obtinrent un grand succès.
Rentré en France avec nos armées, Marchena s'établit à Nîmes, où il publia un grand nombre de traductions espagnoles d'ouvrages philosophiques français. Après la révolution de 1820, il se hâta de rentrer en Espagne ; mais son attachement au parti de Joseph le priva de la considération qu’il aurait pu obtenir, et il mourut à Madrid, dans l'indigence, au commencement de l'année 1821. C'était un homme d'un esprit inquiet et flexible, naturellement généreux, mais sans principes fixes et sans beaucoup de moralité.

 

 

 

 

Voir aussi :
6 décembre 1798

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jos%C3%A9_Marchena

 


     

 

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