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AÉROSTATS.
Du grec aer, air et stato, je me tiens. Lors de
notre première république, un nommé Thilorier
offrit de construire un camp portatif et une montgolfière
d'une telle dimension, qu'elle aurait transporté le camp
et l'armée dans les plaines de l'Angleterre. Le Moniteur
annonça gravement cette invention, mais elle n'excita nul
intérêt. Toutefois, on pensa qu'il pouvait être
utile de recourir à l'emploi du ballon pour examiner les
mouvements de l'ennemi, et ce fut à l'armée de Sambre-et-Meuse,
commandée par le général Jourdan, qu'on fit
les premiers essais. On organisa à cet effet une, compagnie
de 30 hommes placés sous la direction d'un certain Coutelle,
laquelle compagnie, nommée des aérostatiers, fut attachée
au corps de l'artillerie. Les ballons étaient maintenus à
une certaine hauteur aumoyen de cordes que dirigeaient à
terre des conducteurs, comme cela se pratique pour les cerfs-volants
, et des petits drapeaux, de diverses couleurs, tenus par les observateurs
placés dans la nacelle, indiquaient aux hommes d'en bas quand
il fallait élever ou descendre le ballon. Les armées
du Nord, de la Sambre, du Rhin et de la Moselle eurent leurs aérostatiers,
et, en 1794, Fourcroy entretint
la Convention de ces instruments précurseurs de la victoire.
Les aérostats furent, dit-on, d'un grand secours dans la
journée de Fleurus. Le général Bonaparte en
fit aussi usage en Egypte; mais leur emploi, néanmoins, n'eut
pas une longue durée.
Lorsque Coutelle s'éleva devant Mayence, à une portée
de canon de la place, trois bourrasques le rabattirent successivement
jusqu'à terre, et chaque fois l'aérostat se releva
avec une telle vitesse, que les soixante-quatre personnes qui le
retenaient furent entraînées par lui. « L'ennemi
ne tira point, dit Coutelle : cinq officiers, au contraire, sortirent
de la place en montrant un pavillon parlementaire. Nos généraux
allèrent au-devant d'eux. Lorsqu'ils se rencontrèrent,
le général qui commandait la place dit au nôtre
: « Monsieur le général, je vous prie de faire
descendre ce brave officier, le vent va le faire périr; il
ne faut pas qu'il périsse par un accident étranger
à la guerre : c'est moi qui ai fait tirer sur lui à
Maubeuge. » Lorsque le calme fut rétabli, je donnai
le signal de descendre; je trouvai ma petite troupe et les soldats
auxiliaires pâles et consternés. Ils n'avaient pas
été, comme moi, exposés aux regards et à
l'intérêt de plus de cent cinquante mille hommes. »
De 1820 à 1830, de nouvelles et nombreuses études
furent faites en Allemagne et en Angleterre, en vue d'approprier
les ballons au service de la guerre. M. Marey-Monge, parlant du
parti que l'on pourrait tirer des aérostats si l'on parvenait
à les diriger, ajoute : « Que l'on juge, en effet,
de la force d'argument d'une puissance quelconque (l'Angleterre
entre autres), qui arriverait en peu de jours à l'extrémité
du globe, au-dessus de la capitale de son ennemi, à Pékin,
par exemple, avec un énorme ballon transatlantique de 500
chevaux, rempli de bombes monstres, et remorquant plusieurs grands
aérostats pleins de gaz détonants qui pourraient,
au milieu d'une nuit calme, être amenés au-dessus d'une
ville, puis lâchés pour tomber, à l'aide de
poids, sur un point désigné, et détoner ait
moyen d'une mèche enflammée, pendant que le transatlantique
allégé, s'éloignerait dans les airs. Comment
résister à cette sommation d'un amiral faite à
un empereur: - Il me faut telle condition; sinon, je fais sauter
vous, votre capitale, votre armée, les principales villes
de votre empire, et cela en peu de jours et sans qu'il m'en coûte
un seul. homme. »
A la bataille de Solferino, en 1859, l'un des frères Godard
s'éleva dans un ballon retenu, pour observer les mouvements
de l'ennemi. |
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