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Anvers,
5 messidor an XI (24 juin 1803).
Général,
Le préfet
du département des Deux-Nèthes (1)
est généralement estimé et considéré
: point de plaintes de son administration. On ne dit rien des sous-préfets.
Le maire d'Anvers (2) n'a pas, à ce
qu'on assure, les talents nécessaires pour occuper une place
de cette importance dans une ville si considérable ; mais
il y a peu d'étoffe pour le remplacer, lui-même n'a
accepté la mairie qu'avec peine.
Quoique dans un pays assez fanatique, les prêtres se conduisent
bien. On fait l'éloge de l'évêque qui est à
Malines (3).
La contrebande se fait dans ce département par les frontières
de la Hollande; il est même assez difficile de l'empêcher
à moins qu'on ne ferme, comme il est vraisemblable, les arrivages
aux Anglais.
La route de Bruxelles à Anvers est superbe. On dit que celle
d'Anvers à Gand est aussi très bonne.
Anvers est une grande ville très riche. Sa position avantageuse
doit bientôt la rendre une des plus florissantes de la France.
Son commerce s'était singulièrement augmenté
depuis la paix, encore est-il susceptible d'une plus grande extension
si on fait au port les travaux des quais, et dans la ville les bassins
nécessaires pour retirer les bâtiments et les y abriter.
On taille le diamant à Anvers. Autrefois il s'y faisait un
commerce de tableaux. Celui des dentelles s'est beaucoup plus soutenu,
cette branche d'industrie est toujours considérable ainsi
qu'à Malines. On y fabrique encore des chapeaux. Il y a un
clocher assez remarquable et d'une belle architecture, quoique ancienne
; cet ouvrage est espagnol.
C'est une ville où le militaire n'est pas aimé; il
paraît que toujours il en a été de même
; les troupes autrichiennes y étaient détestées.
De là vient peut-être l'éloignement des Anversois
pour la carrière militaire;
c'est sans contredit la partie de la France où la conscription
se lève avec plus de difficulté. On assure que lorsqu'ils
étaient sujets de l'empereur ils avaient le même esprit,
ils préféraient payer des contributions en argent
pour être dispensés de toute espèce de levée
ou de recrutement militaire. Les habitants d'Anvers sont avares,
peu sociables, ils ne se voient même pas entre eux. Le département
est très peu considérable.
Il y a dans la ville une partie de la108e. Ce corps
est au complet de paix, il a reçu environ 350 conscrits,
tous déjà instruits et complètement habillés.
Le chef (4) passe pour un homme sévère,
mais cependant estimé dans sa demi-brigade ; je n'ai ouï
dire rien de particulier sur son opinion. L'esprit du corps paraît
bon.
Comme place de guerre, la ville d'Anvers ne vaut absolument rien.
La citadelle a plus de mérite et peut être considérée
comme assez forte. Une partie des casernes a été détruite
par le siège qu'en fit, je crois, Dumouriez ; le restant
est peu de chose, mais si on se décidait à réédifier,
on peut faire dans cet emplacement de beaux et bons établissements.
Je vous réitère, Général,
l'assurance de mon respect.
Lagrange.
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