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NOOT
(Henri-Nicolas van der), fils de l'amman, ou chef de la
police de Bruxelles, naquit en cette ville en 1750.
Il fit ses études à l'université de Louvain,
fut nommé, très jeune encore, avocat au grand conseil
du Brabant, et se fit peu remarquer dans l'exercice de cette profession.
Son imagination ardente, son âme dévorée d'une
ambition démesurée, lui firent embrasser avec chaleur
contre Joseph II la cause des nobles, des moines et des privilégiés,
qui voyaient avec indignation que le roi voulait réformer
quelques abus, dont eux seuls profitaient. Il soutint ce qu'il appelait
leurs droits dans une brochure qu'il publia à cette occasion.
Non seulement il attaqua avec âpreté les mesures en
elles-mêmes qui, il faut l'avouer, furent souvent accompagnées
d'excès révoltants, mais encore il dirigea ses insultes
contre la personne de l'Empereur. Un mandat de prise de corps fut
lancé contre Noot, qui n'eut que le temps de se réfugier
en toute hâte en Hollande. Beaucoup de mécontents vinrent
le rejoindre, et il se forma une réunion connue sous le nom
de comité de Breda, dont le but était d'expulser
les Autrichiens des Pays-Bas.
Van der Noot, aigri par ses griefs personnels, dominait l'assemblée
par ses déclamations d'autant plus virulentes que, dans son
fanatisme, il était convaincu de la justice de sa cause.
Les mécontents parvinrent à établir des correspondances
dans toutes les provinces, et furent bientôt en état
d'agir. On organisa un corps d'armée de volontaires que l'on
confia au commandement du brave Van der Mersch, excellent officier
supérieur. Le général Mersch fit, à
la tête d'une centaine de jeunes gens, une irruption sur le
territoire autrichien. Ces jeunes têtes, exaltées par
le fanatisme politique et religieux, firent des prodiges de valeur.
Van der Mersch remporta avec cette armée insurrectionnelle
des avantages importants, entre autres auprès de Turnhout,
où il battit complètement l'armée autrichienne,
commandée par le général Schroeder. Toutes
les provinces s'insurgèrent, et se rangèrent en masse
sous la bannière de Van der Noot.
Bruxelles et Gand expulsèrent les garnisons autrichiennes,
et bientôt après toute la Belgique fut évacuée.
Van der Noot fut nommé président d'un congrès
national établi à Bruxelles pour organiser les moyens
de révolution. Il fit dans la capitale du Brabant son entrée
triomphale aux acclamations universelles du peuple, du clergé
et des moines. Le duc et la duchesse d'Ursel, l'archevêque
de Malines, les princes d'Aremberg, le comte Auguste de la Marck,
commandant un régiment français, le comte de Thiennes,
ministre de la police des Pays-Bas, et beaucoup d'autres puissants
personnages, briguèrent l'honneur d'assister à son
triomphe, et lui donnèrent des preuves du plus grand dévouement.
Le pouvoir exécutif fut confié à un grand conseil,
dont Van der Noot était le président. Mais comme l'enthousiasme
n'a qu'un moment et que la médiocrité n'impose pas
longtemps, Van der Noot, exposé au grand jour, parut bientôt
dans toute sa faiblesse ; ce ne fut plus que l'avocat médiocre
de 1789, avec ses phrases sonores et sa virulence aveugle. On lui
reconnut toujours le même zèle, mais on lui dénia
le talent nécessaire. Dans la situation critique des affaires,
il fallait un véritable homme d'État. Van Eupen, plus
adroit et plus subtil, éclipsait déjà Van der
Noot : cet homme nouveau fut nommé secrétaire
du pouvoir exécutif, et exerça un ascendant immense
sur tout le conseil et même sur le président, qu'il
accablait souvent du poids de sa supériorité.
Cependant la nouvelle constitution ne satisfaisait pas également
tous les citoyens. Des dissensions naquirent bientôt des exigences
des classes et des particuliers. Cette république naissante
fut déchirée par les troubles civils. On comparait
la constitution belge avec celle qui venait d’être proclamée
en France, et l'on demandait que les droits et les principes d'égalité
y fussent également consacrés. Les prêtres et
les nobles s'opposaient vivement à ces prétentions ;
tous voulaient des modifications à la constitution, mais
dans un sens contraire. De graves désordres furent la suite
immédiate de cette lutte funeste. Selon l'usage invariable
dans de pareilles circonstances, quelques maisons furent pillées,
dévastées, les maîtres égorgés
par la populace ; et des têtes sanglantes furent portées
sur des piques, jusque dans la salle même du Congrès !
Le pusillanime Van der Noot se contentait de gémir en secret
sur ces horreurs, et achevait par la faiblesse de sa conduite de
se déconsidérer. Le général Van der
Mersch montra beaucoup d'énergie à la tête de
plusieurs compagnies de volontaires de Bruxelles, en essayant de
réprimer les désordres qui se multipliaient.
Van Eupen avait conquis tout l'ascendant de Noot : plusieurs
hommes du peuple conservaient seuls par habitude quelque vénération
pour le chef nominal du gouvernement provisoire, et le proclamaient
encore dans les rues : Père de la patrie !
Pendant ce temps les Autrichiens avaient pris des mesures pour
rentrer en possession de la Belgique. Le brave Van der Mersch était
la seule ressource qui restât à Van der Noot ;
mais indigné des horreurs de l'oligarchie, il se déclara
pour les Vonkistes, parti opposé aux aristo-théocrates,
et qui avait à sa tête l'avocat Vonk ; le gouvernement
provisoire l'abandonna. Il lutta en héros contre des forces
immenses, fut battu, et ses troupes se dispersèrent. La conquête
devint facile aux Autrichiens, qui rétablirent bientôt
la domination impériale. Van der Noot abandonna Bruxelles
le 2 décembre 1790, et se retira de nouveau en Hollande,
où il vécut ignoré.
En 1792, il publia une adresse à ses concitoyens, dans laquelle
il leur conseillait de se réunir aux Français ;
quelque temps après le Directoire exécutif de France
l'accusa d'actes séditieux, et le fit arrêter à
Bergopzoom, en 1796. Son innocence ayant été proclamée
après une année de captivité dans la citadelle
de Bois-le-Duc, il retourna à Bruxelles, où il resta
dans l'obscurité.
On lui attribue une brochure dans laquelle il réclamait,
en 1814, le rétablissement de l'ancienne constitution.
Van der Noot mourut à Stroombeck, près de Bruxelles,
vers le milieu de l'année 1826, et non en 1817, comme l'a
dit prématurément la Biographie Arnault.
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