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GASPARIN
(T.-A. de), conventionnel , né au Pont-Saint-Esprit
vers 1740, d'une famille noble, était capitaine au régiment
de Picardie, lorsque la révolution commença. Il en
adopta les principes avec ardeur , et contribua beaucoup à
faire réunir à la France le comtat Venaissin. Nommé
député à l'assemblée législative
par le département des Bouches-du-Rhône en 1791, il
y montra d'abord quelque modération, et fit au nom du comité
militaire, dont il était membre, plusieurs rapports assez
sages. Mais aux approches du 10 août 1792, son exaltation
révolutionnaire augmenta singulièrement. Il concourut
de tout son pouvoir au renversement du trône, et fut envoyé
aussitôt après comme commissaire dans le midi. Ayant
été réélu député à
la Convention nationale, un décret présenté
par Danton le chargea dans le mois de septembre d'aller avec Lacombe
Saint-Michel et Dubois-Crancé porter au général
Montesquieu l'arrêt de destitution que l'assemblée
venait de prononcer contre lui. Il s'acquitta de cette mission avec
beaucoup de zèle, et revint bientôt à la Convention
où il se lia de plus en plus avec le parti de la Montagne.
Dans la séance du 3 janvier 1793, il dénonça
ses collègues Brissot, Gensonné, Guadet et Vergniaud,
les accusant d'avoir eu des intelligences avec Louis XVI, par l'entremise
du peintre Boze. Les deux derniers de ces députés,
qui étaient présents, repoussèrent avec force
cette accusation, et l'assemblée passa à l'ordre du
jour. Dans le procès du roi, Gasparin vota pour la mort,
contre l'appel au peuple et contre tout sursis à l'exécution.
Envoyé peu de temps après à l'armée
du nord, il s'y trouva au moment de la défection de Dumouriez,
provoqua un décret d'accusation contre ce général,
et concourut à rallier les troupes au parti de la Convention.
Revenu dans la capitale, il fut appelé au comité de
salut public, et fit décréter l'envoi de quatre représentants
auprès de chaque armée. Ayant donné sa démission
de membre du comité de salut public, il fut lui-même
envoyé à l'armée des Alpes, puis à Marseille,
et se trouva chargé avec Salicetti, Fréron et Barras
d'organiser l'armée qui devait assiéger Toulon. C'est
là qu'il distingua Bonaparte et qu'il le fit employer si
utilement pour la république et pour lui-même (V. Napoléon
, au Suppl.). On a cependant fort exagéré les services
qu'il rendit alors au jeune officier d'artillerie, et nous avons
quelques raisons de soupçonner que Napoléon n'a lui-même
parlé avec tant de chaleur de sa tardive reconnaissance,
que pour cacher son ingratitude envers Barras, qui avait été
réellement son bienfaiteur (1). Cette version est d'autant
plus probable que Gasparin ne fut présent qu'aux premiers
jours du siège, que Bonaparte envoyé tout récemment
de Paris était à peine arrivé à l'armée
lorsque ce représentant, obligé de s'en éloigner
pour cause de maladie, se rendit à Orange où il mourut
le 7 novembre 1793 (21 brumaire an II). Ce n'est que dans les premiers
jours du mois suivant que le siège fut poussé avec
quelque vigueur, et que Bonaparte s'y distingua aux attaques des
forts ennemis. Toulon ne fut au pouvoir des républicains
que le 20 décembre; il y avait alors deux mois que Gasparin
avait quitté l'armée, et il y avait six semaines qu'il
était mort. Toutes les sociétés populaires
de la Provence prirent un arrêté pour honorer la mémoire
de ce député Montagnard, qui le premier avait
dénoncé l'infâme Boze, agent du ci-devant roi
et des traîtres Guadet et Vergniaud. Le commissaire du
comité de salut public, Mittié fils, prononça
son oraison funèbre qui fut envoyée à la Convention
nationale par le citoyen Prade, lequel s'intitulait le Jacobin
de Paris. Il faut lire dans le Moniteur cette pièce
bizarre pour croire à toute la démence de cette époque.
Le cœur de Gasparin fut envoyé à la Convention , et
l'on demanda pour lui les honneurs du Panthéon, qui cependant
ne furent pas accordés. Six mois plus tard son ami Granet
demanda encore pour lui des honneurs funèbres. Le 10 octobre
1794, trois mois après la chute de Robespierre, on lut à
la Convention une lettre de Gasparin au même Granet, qui prouve
que, dans sa mission à Marseille, il n avait pas toujours
été d'accord avec Barras et Fréron. M—DJ.
(1) Ce n'est
que bien longtemps après la mort de Gasparin, et lorsque
Napoléon fut parvenu au faîte de la puissance, qu'il
parut se souvenir des services que ce député lui avait
rendus. Alors il fit faire des recherches pour trouver sa famille
; et, ayant découvert qu'il avait laissé deux fils,
il les combla de bienfaits pendant sa vie, et leur laissa cent mille
francs par son testament. L'un d'eux est aujourd'hui pair de France
(V. Barras, LVII, 183, note 2 ).
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