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Desmarets
(Charles), fameux chef de la police impériale, naquit en
1763 à Compiègne, fils d'un artisan qui obtint pour
lui de l'évêque de Soissons une bourse au collège
de Louis-le-Grand, où il fut élévé avec
l'abbé Legris-Duval, devenu plus tard célèbre
par la fondation d'une maison de charité pour les orphelins
savoyards. Doué d'un esprit fin et délié, Desmarets
brilla parmi ses compagnons d'études. Il s'était voué
à l'état ecclésiastique lorsque la révolution
survint, et changea ses projets. Prêtre et chanoine de la
cathédrale de Chartres, il abandonna aussitôt le ministère
sacré. Entreprenant par caractère et révolutionnaire
par goût, il ne put rester spectateur impassible de la lutte
qui s'engagea entre les divers partis. D'abord employé dans
une administration militaire, il épousa une demoiselle de
Neufchâtel en Suisse, et fut attaché à l'administration
des vivres dans l'armée d'Italie. Quoique dans un poste secondaire,
il eut plus d'une fois l'occasion de se faire remarquer par les
chefs de l'armée, et particulièrement par Bonaparte,
à qui l'on croit que dès lors il rendit quelques services.
Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'aussitôt après
le 18 brumaire il remplaça à la police M. Tissot,
dans la direction des affaires les plus importantes et les plus
secrètes. D'un caractère souple et rusé, ayant
beaucoup de mémoire et une aptitude particulière à
poser des question insidieuses, il était parfaitement à
sa place. Impassible et sans attachement pour personne, il vit tomber
Fouché, et sut gagner les bonnes grâces de Savary qui
lui succéda. Il conserva son emploi pendant quinze années,
et fut successivement chargé de surveiller, de réprimer,
et même, on peut le dire, quelquefois d'inventer ou tout au
moins d'arranger tous les complots qui occupèrent la police
impériale pendant ce long intervalle. On cite notamment l'affaire
du faux Kolly, envoyé à Valencay au roi d'Espagne
(voyez Ferdinand VII, au Suppl.) Toute la correspondance et les
pièces contrefaites, afin de tromper le jeune prince, étaient
de la main de Desmarets. Personne assurément n'a dû
plus que lui être dans le secret de tous les actes ténébreux
de cette époque. Cette opinion généralement
répandue fit espérer que les Mémoires
posthumes qu'il avait laissés offriraient les révélations
les plus curieuses ; mais sur ce point l'attente du public fut complètement
trompée. Ces mémoires que l'on a publiés en
1833, 1 vol. in-8° ne sont évidemment qu'une apologie,
une justification personnelle par laquelle Desmarets se proposait
de répondre aux graves reproches qui lui étaient adressés.
On n'y trouve pas un éclaircissement utile sur les affaires
du duc d'Enghien, de Pichegru, du capitaine Wright et de tant d'autres
mystères d'iniquité que personne mieux que lui n'avait
dû connaître. Après la chute de Napoléon,
Desmarets se retira dans une propriété qu'il possédait
près de Compiègne ; et c'est là qu'il est mort
en 1832, après avoir pendant les Cent jours repris sa place
à la police ; ce qui le fit porter sur une liste de suspects
et mettre en surveillance arès le second retour des Bourbons,
à la fin 1815, par son ancien supérieur Fouché,
devenu une fois encore ministre de la police. Desmarets, il faut
le dire à sa louange, ne laissa pas une fortune proportionnée
à celle qu'il aurait pu faire s'il eût manqué
de probité. Napoléon l'a fait chevalier de le légion
d'honneur. (1).
M_dj. (Michaud jeune.)
(1) En 1823 les mémoires de Méhée
de la Touche donnèrent lieu à une polémique
de laquelle il résulta que Desmarets avait joué un
mauvais rôle dans l'affaire de V. Couchery (Voyez le Journal
des Débats du 16 décembre 1823.) p 398-399.
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