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Bouhtay (Henri-Noël) 1777-1852

 

 

Nécrologe liégeois pour 1852. Liège, janvier 1853.

 
 

Bouhtay (Henri-Noël), général-major honoraire, chevalier des ordres de Léopold et de la Légion d'honneur, ancien aide-de-camp du général comte Lobau (1815), ancien chef de division au ministère de la guerre (1831), vice-président de la Commission administrative de Institut royal des sourds-muets et des aveugles de Liège, ancien membre du Conseil d'administration de la Société libre d'Emulation, né le 8 juillet 1777 à Liège, où il est mort le 25 mars. (1)
La carrière militaire de Bouhtay commença sous les drapeaux de la République. Résistant à ses parents, qui le destinaient au commerce, il s'engagea, le 4 septembre 1798, après avoir fait ses humanités au Collège de Liège. Il parcourut avec distinction tous les grades inférieurs, obtint l'épaulette de sous-lieutenant en février 1812, fut nommé lieutenant-adjudant du général Dulong le 18 août 1813, et reçut le brevet de capitaine quelques jours après. Fait prisonnier de guerre par les Autrichiens le 11 novembre suivant, il fut dirigé sur la Hongrie et ne parvint à être libéré qu'en juin 1814. Au mois de mai 1815, le comte Lobau le choisit pour aide de camp. Il assista à la bataille de Waterloo, fut blessé et eut deux chevaux tués sous lui. (2)
Le capitaine Bouhtay obtint sa démission honorable le 9 septembre 1815, et vint offrir ses services au roi des Pays-Bas. Mais le fait de s'être trouvé à Waterloo dans les rangs de l'armée française était, aux yeux du Gouvernement, un crime impardonnable. Ce fut seulement le 13 juin 1816 que notre brave concitoyen obtint un brevet de capitaine d'infanterie, position qu'il conserva jusqu'au 31 décembre 1828, où il fut mis en non-activité de service et peu après pensionné. Si, comme nous le montrons plus loin, ce gouvernement ne le trouvait pas digne d'avancement, il ne dédaigna cependant pas de tirer parti de son savoir et de son expérience en le chargeant de plusieurs missions délicates.
Immédiatement après la révolution , le 15 octobre 1830, Bouhtay rentra dans l'armée belge avec le grade de major d'état-major, et fut désigné quelques semaines après pour remplir les fonctions de chef d'état-major de la 4e division militaire. Nommé lieutenant-colonel, chef de la division du personnel au ministère de la guerre le 23 juin 1831, il fut promu au grade de colonel le 15 juillet 1832. Le 7 octobre suivant, le Roi Léopold le nomma commissaire près du général français chargé du siège d'Anvers.
Du 15 janvier 1833 au 18 juin 1839, Bouhtay remplit successivement les fonctions de chef d'état-major près la 6e division territoriale, près le commandant supérieur de Venloo et près la lre division territoriale.
En lui accordant une pension de retraite le 18 juillet 1842, le Roi lui conféra le grade de général-major honoraire.
Bouhtay possédait des connaissances étendues et parlait avec facilité plusieurs langues. A onze ans, il savait du latin ce qu'on en pouvait apprendre alors. Envoyé à Bois-le-Duc pour y soigner des intérêts privés, il revint de cette ville, après un court séjour, familiarisé avec l'idiome de la Néerlande. Entré au service en 1798, il acquit avec non moins de promptitude la connaissance de l'allemand. Les guerres de l'Empire lui fournirent l'occasion d'étudier le polonais et surtout l'espagnol, langue qu'il posséda au point de traduire en vers, à Séville, à la suite d'une discussion provoquée par la lecture d'une ode castillane sur la mort, les fameuses stances de Malherbe à du Perrier. Rentré en Belgique, une nouvelle ère s'ouvrit pour lui. En 1823-1824, on le trouve inspecteur des écoles à Namur ; en 1825, il dirige avec le plus grand succès l'école régimentaire de la 12e Afdeeling et y enseigne le hollandais. En 1827, le gouvernement des Pays-Bas, ayant résolu de charger deux officiers d'élite de chaque régiment d'étudier à Louvain les méthodes popularisées depuis sous le nom de Jacotot, et de les introduire, s'il y avait lieu, dans l'armée, Bouhtay fut désigné pour remplir cette intéressante mission, et faire partie, comme on disait alors, de la Compagnie normale. Notre concitoyen, par ses aptitudes spéciales, devait réussir dans l'accomplissement d'une pareille tâche. Il se passionna pour cette méthode, parce qu'il se sentait capable d'en tirer parti, et qu'il y avait une secrète affinité entre sa nature intellectuelle et la nature même du maître. En moins de neuf mois, il avait mis deux soldats wallons du Condroz, d'ailleurs doués de moyens assez médiocres, en état de soutenir publiquement, en présence du corps académique de Louvain, une discussion en langue hollandaise. Bouhtay se prit lui-même pour sujet d'une expérience : il consacra pendant soixante jours, à l'étude de la langue anglaise, un quart d'heure d'intervalle dont il pouvait profiter entre deux leçons, et, après ce temps, c'est-à-dire après quinze heures de travail, il traduisit à livre ouvert, à la Société militaire de Louvain, des passages de différents auteurs. Usé par un labeur trop assidu et abreuvé de dégoûts de plus d'un genre, il quitta la Compagnie normale un an avant la révolution belge.
Les connaissances variées de l'honorable général, sa bienveillance, son zèle à toute épreuve, le signalèrent à la Commission administrative de l'Institut royal des sourds-muets et des aveugles de Liège, qui, en 1844, l'associa à ses travaux. Les services qu'il ne cessait de rendre à cet établissement venaient d'être reconnus par une élection à la vice-présidence de la Commission , lorsque la mort l'enleva inopinément.
Doué d'une intelligence vive et lucide, peu disposé à se faire l'esclave de préjugés traditionnels, et pourtant ami de l'ordre et de la discipline, Bouhtay ne se laissa pénétrer de l'esprit du XVIIIe siècle qu'en ce qu'il avait de réellement fécond et d'émancipateur. Il y avait en lui deux natures ou plutôt deux tendances : l'une le portait vers la science, vers la réflexion et la vie retirée ; l'autre, vers une existence active et aventureuse ; mais si loin que l'on remonte dans les souvenirs de ceux qui l'on connu de près, on trouve ses instincts dominés et conciliés par son cœur. S'il acquit de l'instruction, ce fut pour en faire jouir ses semblables ; s'il figura avec distinction sur les champs de bataille, ce ne fut jamais l'ambition ou une ardeur inconsidérée qui l'inspira, mais bien le sentiment du devoir.

 
 
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(1) Nous empruntons la plus grande partie de cette notice au Nécrologe des officiers de l'armée belge pour 1859 et aux discours prononcés sur la tombe de Bouhtay par le général Du Pont et par M. A. Le Roy, secrétaire de la Commission administrative de l'Institut royal des sourds-muets.
(2) Peu de nos concitoyens possèdent un état de services aussi bien rempli que celui du général Bouhtay. De 1798 à 1815, il assista à presque toutes les grandes batailles de cette mémorable époque.
Dès 1798, il donne déjà des preuves de valeur au siège d'Ehrenbreitstein. - Le 21 mars 1799, il se distingue au combat de Pfullendorff. - Le 25 du même mois, il se trouve à la bataille meurtrière de Stockach, dans laquelle Soult, à la tête de 40.000 hommes, tint tête à 75,000 Autrichiens.
Le 25 mai suivant, il est blessé d'un coup de sabre à la tête au combat de Winterthur, ce qui ne l'empêche pas d'assister, peu de jours après, à un nouveau combat près de Zurich.
En 1800 et en 1801, il assiste au passage du Saint-Gothard se bat sous le château de Milan, prend part à la bataille de Pozzolo, aux combats de Montebello et de Castelfranco. - Il passe les années 1803 et 1804 au camp de Boulogne. - En 1805, il assiste au combat de Guntzberg, à la prise d'Ulm, et aux batailles de Hollabrunn et d'Austerlitz. - En 1806, il se trouve a la bataille d'Iéna ; en 1807, au siège de Dantzig et à la bataille de Friedland, d'où il passe avec son régiment à l'armée d'Espagne. - En 1808, il campe près de Miranda. - En 1809, il prend part aux combats de Bilbao, de Logrono, d'Almatorez et à la bataille de Talavera. - En 1810, 1811 et 1812 , il assiste à différentes affaires dans la Sierra-Morena, se trouve à la prise de Malaga, au combat de la Venta de Bahul, au siège de Cadix, et aux batailles de Salamanque et d'Albufera, où il est blessé d'une balle à la jambe droite. - En 1813, il est cantonné dans la Vieille-Castille. - A peine remis de sa blessure, il est attaché au général Dulong, part pour l'armée d'Allemagne, assiste à différents combats près de Lowenberg et de Nollendorff. - Il se trouve enfin a la bataille de Dresde, où il est fait prisonnier et dirigé sur la Hongrie.
 
 

 

         

 

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