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Bourrienne

     

 

Encyclopédie des Gens du monde, t

   
 

Bourrienne (Fauvelet de), secrétaire de Napoléon et ministre d'état sous Louis XVIII, naquit à Sens (Yonne) en 1769. Élève à l'école de Brienne en même temps que Bonaparte, ils se lièrent d'affection au milieu de leurs études. Lorsque Bonaparte, en 1785, quitta Brienne pour passer à l'Ecole militaire de Paris, Bourrienne l'accompagna jusqu'au coche de Nogent-sur-Seine, où ils se quittèrent avec un grand chagrin, pour ne plus se revoir qu'en 1792. En se séparant ils se promirent une amitié éternelle, et Bourrienne donna même sa parole à Bonaparte de suivre la même carrière qu'il embrasserait ; c'est ce que celui-ci lui rappela dans une lettre qu'il lui écrivit un an après son départ de Brienne. Sorti de cette école en 1787, et ne pouvant à 10 ans entrer dans l'artillerie, pour laquelle il avait une grande répugnance, Bourrienne se transporta dans la capitale de l'Autriche, où il eut occasion de voir l'empereur Joseph II ; il se rendit ensuite dans une des universités d'Allemagne, pour étudier le droit public et quelques langues étrangères. A peine était-il arrivé à Leipzig que la révolution française éclata. Il parcourut la Prusse, la Pologne, avant de revenir à Paris en 1792. Il revit Bonaparte : leur amitié d'enfance se renouvela tout entière. Pendant le temps de la vie un peu vagabonde qu'ils menèrent dans la capitale, arriva le 20 juin, sombre prélude de l'événement du 10 août. Dès ce moment, inscrit sur la liste des émigrés, il en fut rayé sur les instances de Bonaparte, qui commençait à être compté pour quelque chose. Arrêté néanmoins comme émigré rentré, Bourrienne fut bientôt rendu à sa famille sous la responsabilité de deux amis recommandables. De Sens il revint à Paris après le 13 vendémiaire, où il revit de loin en loin Bonaparte, alors commandant en second de la ville de Paris, sous le général Barras. Enfin Bonaparte, dont la brillante carrière s'agrandissait tons les jours, ayant été nommé général en chef de l'armée d'Italie, après les revers du général Scherer, appela Bourrienne auprès de lui au moment où le traité de Campo-Formio était sur le point de se conclure : M. de Bourrienne en rédigea le texte de concert avec le général Clarke. C'est de cette époque qu'après avoir été conseiller d'état de la république en l'an X, commença la carrière politique de cet ancien ami de Bonaparte. Bourrienne le suivit en Egypte comme son secrétaire intime. Au retour de cette contrée, un gouvernement consulaire ayant été créé en France, il resta secrétaire du premier consul. Mais, lorsqu'il s'éleva sur les débris de la république une nouvelle dynastie, Bourrienne fut nommé, en 1804, par l'empereur Napoléon, son ministre plénipotentiaire à Hambourg. Rentré en France à la fin de 1813, il fut nommé directeur des postes par le gouvernement provisoire, et en 1814 préfet de police. Ayant peut-être trop oublié son amitié et ses promesses de collège il suivit, non son ancien ami à Ste-Hélène, mais Louis XVIII à Gand, et à son retour il fut nommé par le roi ministre d'état. Élu député en 1815 et depuis à plusieurs reprises, Bourrienne siégea au côté droit jusqu'en 1837. La révolution de juillet 1830 et la perte de sa fortune, qui, dit-on, en fut la suite, égarèrent sa raison. Transporté en Normandie, il a passé les deux dernières années de sa vie dans une maison de santé à Caen, où il est mort, en 1834, des suites d'une attaque d'apoplexie.

     
  Les Mémoires de M. de Bourrienne, écrits par lui-même, rédigés par M. de Villemarest et publiés de 1829 à 1831, en 10 vol. in-8°, ont fait connaître un grand nombre de particularités intéressantes sur la jeunesse de Napoléon, sur ses rapports avec Joséphine, sur le directoire et le consulat, etc. Malgré beaucoup de choses inutiles ou controuvées, ils offrent dans plusieurs parties un intérêt réel. Les erreurs qu'ils contiennent ont été relevées dans l'ouvrage intitulé : Bourrienne et ses erreurs volontaires et involontaires, Paris, 1830, 2 volumes in8° F. R-d.    

 

L'Ami de la Religion, journal ecclésiastique, politique et littéraire, 11 février 1834, p. 107 :

   
 

M. Fauvelet, comte de Bourrienne, ancien député et ministre d’Etat sous la restauration, est mort le 7 à Caen, des suites d’une attaque d’apoplexie. M. de Bourrienne avait été secrétaire de Buonaparte à l’armée d’Italie, en Egypte et au Consulat. Il fut nommé conseiller d’Etat en l’an 10, et ensuite ministre plénipotentiaire à Hambourg. La perte de sa fortune et la révolution de juillet avaient beaucoup affecté ses facultés. Il a passé une partie des trois dernières années dans une maison de santé.

     

 

 

On lit dans "le Publiciste" du 15 floréal an VIII, l'article suivant, daté de la veille à Paris : "Le secrétaire intime du premier consul, le citoyen Bourienne, a dû partir aujourd'hui."

Bourrienne, secrétaire de Napoléon, raconte dans ses Mémoires le départ de Paris en floréal an VIII (mai 1800) :

   
 

"La constitution ne donnait pas au Premier Consul le droit d'aller, hors du territoire de la République, commander une armée. Il ne voulut pas que l'on connût le projet qu'il avait formé depuis longtemps d'aller se mettre à l'armée d'Italie qu'il appela alors pour la première fois la "Grande Armée".
Avant de partir, il fit venir M. Collot qui se rendit aussitôt dans le cabinet où nous étions.
- Eh bien, Collot, lui dit-il, je vais en Italie. Il s'agit d'un grand coup. La campagne sera courte... J'ai besoin de vous, je vous emmène.
M. Collot n'avait pas l'air de se soucier beaucoup de faire cette campagne, mais plus il hésitait, plus Bonaparte insistait. Il fut enfin convenu que M. Collot irait en Italie, dans le cas seulement où le Premier Consul prendrait le commandement de l'armée.
Bonaparte fixa le jour de notre départ de Paris au 6 mai, ou, selon le calendrier d'alors, au 16 floréal.
Toutes ses dispositions étaient prises, tous ses ordres donnés, mais il ne voulait pas encore que l'on crût qu'il allait commander l'armée.
La veille, ayant chez lui les deux autres consuls et les ministres, il dit à Lucien :
- Prépare pour demain matin une circulaire aux préfets ; vous, Fouché, vous la ferez publier dans les journaux. Dites que je suis parti pour Dijon, où je vais inspecter l'armée de réserve ; vous pourrez ajouter que j'irai peut-être jusqu'à Genève, mais que je ne serai pas absent plus de quinze jours... S'il se passait quelque chose, je reviendrais comme la foudre !...
Nous partîmes à 2 heures du matin et nous suivîmes la route de la Bourgogne que nous avions déjà parcourue tant de fois dans des circonstances si différentes.
Si, depuis le 18 brumaire, la France avait reçu d'innombrables améliorations, ce n'était pas avec la même satisfaction que l'on pouvait jeter les yeux sur les affaires du dehors. L'Italie était perdue et, dès les frontières de la Provence, on voyait la fumée des bivouacs autrichiens. Boanaparte ne se faisait pas d'illusions et répétait sans cesse :
- Il faut jouer le tout pour le tout....
L'armée qu'il allait attaquer était une armée nombreuse, aguerrie, victorieuse ; lui, à l'exception d'un très petit nombre d'hommes, n'avait que des conscrits, mais ces soldats improvisés étaient commandés par des chefs dont rien ne pouvait égaler l'ardeur.
Bonaparte voyait le danger, mais sans en être effrayé.
- J'ai, disait-il, beaucoup de conscrits dans mon armée, mais ces conscrits sont Français. Il y a quatre ans, n'est-ce pas avec une faible armée que j'ai chassé devant moi des hordes de Sardes, d'Autrichiens et balayé l'Italie ? Nous ferons de même. Le soleil qui nous éclaire est celui qui nous éclairait à Arcole et à Lodi.

     

 

Biographie des hommes vivants, ou Histoire par ordre alphabétique (...) Paris, L.G. Michaud, septembre 1816.

   
 

BOURIENNE (Louis-Antoine Fauvelet de), né à Sens le 9 juillet 1769, fut élevé à l'Ecole-militaire de Brienne avec Napoléon Buonaparte, et se lia intimement avec lui. Destiné à la diplomatie, il se rendit, en décembre 1788, à l'université de Leipzig , où il étudia les langues et le droit public jusqu'en 1791. Il voyagea ensuite en Pologne, revint en France en 1792, et fut nommé secrétaire de légation à Stuttgard, où il arriva le 4 août de la même année. Rappelé lors de la guerre avec l'empire germanique, il revint en France en février 1793; mais il retourna bientôt à Leipzig, où il avait formé une liaison d'amour, et il s'y maria. On se rappelle qu'à cette époque les Français excitaient partout des défiances ; M. de Bourienne fut bientôt soupçonné d'avoir des intelligences politiques avec un agent de la république française, il fut arrêté en même temps que cet agent, par ordre de la cour de Dresde. Après 70 jours de détention, il lui fut ordonné de quitter l'électorat de Saxe. Lors de son premier voyage en Allemagne, M. de Bourienne avait été inscrit sur la liste des émigrés du département de l'Yonne. Il paraît qu'à son retour il fit rayer cette inscription ; mais il ne put obtenir aucune place jusqu'à ce que la nomination de son ancien condisciple au commandement de l'armée d'Italie vînt lui ouvrir la carrière de la fortune. Buonaparte l'ayant appelé près de lui, il le rejoignit à Grau, dans le mois de juin 1797, et fut aussitôt son secrétaire intime. Depuis il ne le quitta plus, et le suivit dans toutes ses campagnes, en Italie, en Egypte et à Marengo. Après l'élévation de Buonaparte au consulat, M. de Bourienne vit encore sa faveur s'augmenter: il fut admis dans tous les secrets de la politique, et nommé conseiller d'état le 20 juillet 1801. Mais ayant ensuite été compromis dans la faillite de la maison Coulon, Buonaparte en montra beaucoup de mécontentement: il éloigna son secrétaire ; et M. de Bourienne semblait être dans une disgrâce complète, lorsqu'il fut nommé chargé d'affaires de France à Hambourg, et envoyé extraordinaire près le cercle de Basse-Saxe. Des dénonciations faites à l'empereur le poursuivirent dans l'exercice de ces nouvelles fonctions : mais l'intimité de leurs liaisons, et peut-être des motifs encore plus puissants, sauvèrent encore M. de Bourienne des dangers auxquels succombèrent le consul Lâchevardière et le maréchal Brune, impliqués l'un et l'autre dans les mêmes affaires. Il continua de résider à Hambourg, et ne revint à Paris qu'en 1813. M. de Bourienne était dans cette dernière ville au moment de la déchéance de Buonaparte. Le gouvernement provisoire le nomma, le 3 avril 1814, directeur-général des postes ; mais dès que le Roi fut arrivé, M. Ferrand le remplaça dans cet emploi. Resté alors avec le titre de conseiller-d'état honoraire, M. de Bourienne fut sans emploi jusqu'aux premiers jours de mars 1815, où le besoin d'hommes habiles et dévoués fit jeter les yeux sur lui pour la préfecture de police de Paris. Le Roi le nomma à cette place le 13 mars : mais déjà le mal était sans remède ;et les mesures que M. de Bourienne ordonna à la hâte ne purent arrêter le torrent. Le 16 mars il donna ordre d'arrêter Fouché ; mais cet ordre fut mal exécuté. Obligé de fuir, il se rendit à Gand, et il ne revint à Paris que dans le mois de juillet, avec le Roi. Il fit alors lever le séquestre apposé sur ses biens par ordre de Buonaparte ; et il fut nommé conseiller d'état en service ordinaire, section du commerce et de l'intérieur, le 24 août 1815, puis membre du conseil privé, par ordonnance du 17 septembre suivant. Dans le même mois, il fut élu députe par le département de l'Yonne, et fut, le 19 janvier 1816 , l'un des commissaires du quatrième bureau pour l'examen du budget. Il fit aussi partie de la section chargée des budgets des ministères de la justice, de l'intérieur et de la police, et parla plusieurs fois sur des objets de finances, et prononça entre autres un discours très bien fait contre le plan de finances des ministres, et vota presque toujours avec la majorité de la chambre. On lui a attribué un ouvrage publié en 1814, sous ce titre: i-Histoire de Buonaparte, par un homme qui ne l'a pas quitté depuis quinze ans ; mais les gens qui connaissent M. de Bourienne n'ont point adopté cette opinion , d'abord parce qu'on ne retrouve point son esprit dans ce livre, et ensuite, parce que, s'il eût voulu écrire sur ce sujet, il était à même d'en dévoiler beaucoup plus aux lecteurs. Il a publié sous son nom : I. L'inconnu, drame en cinq actes et en prose, traduit librement d'une pièce allemande intitulée, Misantropie et Repentir, du président Kotzebue, 1792, in-12. II. Observations sur le budget de 1816 , et sur le Rapport de M. le comte Garnier à la chambre des pairs, Paris, 1816. M. de Bourienne a réfuté dans ce rapport les assertions de M. Garnier, dirigées contre la majorité de la chambre des députés. D.

     

 

 

 

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