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Dernière modification: 15/11/2002
Articles préliminaires de paix
entre
la République française et Sa Majesté Britannique, signés, à Londres, le 9
vendémiaire an 10 de la République française, le 1er octobre 1801. Le premier consul de
la république française, au nom du peuple français, et Sa Majesté le roi du
royaume uni de la Grande-Bretagne et d’Irlande ; animés d’un désir égal
de faire cesser les calamités d’une guerre destructive, et de rétablir entre
les deux nations, l’union et la bonne intelligence, ont nommé à cet effet,
savoir : le premier consul de la république française, au nom du peuple français,
le C.en
Louis-Guillaume Otto, commissaire chargé de l’échange des prisonniers
français en Angleterre ; et Sa Majesté Britannique , le sieur
Robert-Banks-Jenkinson, lord Hawkesbury,
du conseil privé de Sa Majesté Britannique, et son principal secrétaire d’état
pour les affaires étrangères ; lesquels, après s’être dûment communiqué
leurs pleins pouvoirs en bonne forme, sont convenus des articles préliminaires
suivants : ART. Ier. Aussitôt
que les préliminaires seront signes et ratifiés, l’amitié sincère sera rétablie
entre la république française et Sa Majesté Britannique, par terre et par
mer, dans toutes les parties du monde. En conséquence, et pour que toutes
hostilités cessent immédiatement entre les deux puissances, et entre elles et
leurs alliés respectivement, les ordres seront transmis aux forces de terre et
de mer avec la plus grande célérité, chacune des parties contractantes
s’engageant à donner les passeports et les facilités nécessaires pour accélérer
l’arrivée desdits ordres, et assurer leur exécution.
Il est de plus convenu que toute conquête qui aurait eu lieu de la part
de l’une ou l’autre des parties contractantes, sur l’une d’elles ou sur
leurs alliés, après la ratification des présents préliminaires, sera regardée
comme non avenue, et fidèlement comprise dans les restitutions qui auront lieu
après la ratification du traité définitif. II. Sa Majesté
Britannique restituera à la république française et à ses alliés, et nommément
à Sa Majesté Catholique et à la république Batave, toutes les possessions et
colonies occupées ou conquises par les forces anglaises, dans le cours de la
guerre actuelle, à l’exception de l’île de la Trinité et des possessions
hollandaises dans l’île de Ceylan, desquelles îles et possessions, Sa Majesté
Britannique se réserve la pleine et entière souveraineté. III. Le port du cap
de Bonne-Espérance sera ouvert au commerce et à la navigation des deux parties
contractantes, qui y jouiront des mêmes avantages. IV. L’île de
Malte avec ses dépendances sera évacuée par les troupes anglaises, et elle
sera rendue à l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem ; pour assurer l’indépendance
absolue de cette île de l’une ou de l’autre des deux parties contractantes,
elle sera mise sous la garantie et la protection d’une puissance tierce, qui
sera désignée par le traité définitif. V. L’Egypte sera
restituée à la sublime Porte, dont les territoires et possessions seront
maintenus dans leur intégrité, tels qu’ils étaient avant la guerre
actuelle. VI. Les territoires
et possessions de Sa Majesté très-fidèle seront aussi maintenus dans leur intégrité. VII. Les troupes
françaises évacueront le royaume de Naples et l’Etat-Romain. Les forces
anglaises évacueront pareillement Porto-Ferrajo, et généralement tous les
ports et îles qu’ils occuperaient dans la Méditerranée ou dans
l’Adriatique. VIII. La république
des Sept-Iles sera reconnue par la république française. IX. Les évacuations,
cessions et restitutions stipulées par les présents articles préliminaires,
seront exécutées, pour l’Europe, dans le mois ; pour le continent et les
mers d’Amérique et d’Afrique, dans les trois mois ; pour le continent et
les mers d’Asie, dans les six mois qui suivront la ratification du traité définitif. X. Les prisonniers
respectifs seront, d’abord après l’échange des ratifications du traité définitif,
rendus en masse et sans rançon, en payant, de part et d’autre, les dettes
particulières qu’ils auraient contractées. Des discussions s’étant
élevées touchant le paiement de l’entretien des prisonniers de guerre, les
puissances contractantes se réservent de décider cette question, par le traité
définitif, conformément au droit des gens et aux principes consacrés par
l’usage. XI. Pour prévenir
tous les sujets de plaintes et de contestations qui pourraient naître à
l’occasion des prises qui seraient faites en mer après
la signature des articles préliminaires, il est réciproquement convenu
que les vaisseaux et effets qui pourraient être pris dans la Manche et dans les
mers du Nord après l’espace de douze jours, à compter de l’échange des
ratifications des présents articles préliminaires, seront, de part et
d’autre, restitués ; que le terme sera d’un mois, depuis la Manche et les
mers du Nord jusqu’aux îles Canaries inclusivement, soit dans l’Océan,
soit dans la Méditerranée ; de deux mois, depuis lesdites îles Canaries
jusqu’à l’Équateur ; et enfin, de cinq mois, dans toutes les autres
parties du monde, sans aucune exception ni autre distinction plus particulière
de temps et de lieu. XII. Tous les séquestres
mis de part et d’autre sur les fonds, revenus et créances, de quelqu’espèce
qu’ils soient, appartenant à une des puissances contractantes, ou à ses
citoyens ou sujets, seront levés immédiatement après la signature du traité
définitif. La décision de
toutes réclamations entre les individus des deux nations, pour dettes, propriétés,
effets ou droits quelconques, qui, conformément aux usages reçus et au droit
des gens, doivent être reproduites à l’époque de la paix, sera renvoyée
devant les tribunaux compétents, et dans ces cas, il sera rendu une prompte et
entière justice dans le pays où les réclamations seront faites
respectivement. Il est convenu que le présent article sera, immédiatement après
la ratification du traité définitif, appliqué, par les puissances
contractantes, aux alliés respectifs et aux individus de leurs nations, sous la
condition d’une juste réciprocité. XIII. A l’égard
des pêcheries sur les côtes de Terre-Neuve et des îles adjacentes, et dans le
golfe de Saint-Laurent, les deux puissances sont convenues de les remettre sur
le même pied où elles étaient avant la guerre actuelle, se réservant de
prendre, par le traité définitif les arrangements qui paraîtront justes et réciproquement
utiles, pour mettre la pêche des deux nations dans l’état le plus propre à
maintenir la paix. XIV. Dans tous les
cas de restitution convenus par le présent traité, les fortifications seront
rendues dans l’état où elles se trouvent au moment de la signature du présent
traité ; et tous les ouvrages qui auront été construits depuis
l’occupation, resteront intacts. Il est convenu, en
outre, que, dans tous les cas de cession stipulés dans le présent traité, il
sera alloué aux habitants, de quelque condition ou nation qu’ils soient, un
terme de trois ans, à compter de la notification du traité de paix définitive,
pour disposer de leurs propriétés acquises et possédées, soit avant, soit
après la guerre actuelle, dans lequel terme de trois ans, ils pourront exercer
librement leur religion, et jouir de leurs propriétés. La même faculté
est accordée dans les pays restitués à tous ceux qui y auront fait des établissements
quelconques pendant le temps où ces pays étaient possédés par la
Grande-Bretagne. Quant aux autres
habitants des pays restitués ou cédés, il est convenu qu’aucun d’eux ne
pourra être poursuivi, inquiété ou troublé dans sa personne ou dans sa
propriété, sous aucun prétexte, à cause de sa conduite ou opinion politique,
ou de son attachement à aucune des deux puissances, ou pour toute autre raison,
si ce n’est pour les dettes contractées envers des individus, ou pour des
actes postérieurs au traité définitif. XV. Les présents
articles préliminaires seront ratifiés, et les ratifications échangées, à
Londres, dans le terme de quinze jours pour tout délai ; et, aussitôt après
leur ratification, il sera nommé, de part et d’autre, des plénipotentiaires,
qui se rendront à Amiens pour procéder à la rédaction du traité définitif,
de concert avec les alliés des puissances contractantes. En foi de quoi, nous
soussignés, plénipotentiaires du premier consul de la République française,
et de sa Majesté britannique, en vertu de nos pleins pouvoirs respectifs, avons
signé les présents articles préliminaires, et y avons fait apposer nos
cachets. Fait à Londres, le
neuf vendémiaire an dix de la République française, le premier jour
d’octobre mil huit cent un. Signé
Otto,
Hawkesbury. (Journal
de Paris, 15 vendémiaire an X.) |
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