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Jourdan
(Mathieu Jouve) dit Coupe-tête, un des monstres
les plus horribles de l'époque révolutionnaire. Né
en 1749, dans un village du Vivarais, successivement apprenti maréchal-ferrant,
garçon boucher, soldat, contrebandier, et, comme tel, condamné
à mort par contumace à Valence, Jourdan vint se cacher
à Paris, sous le nom de Petit. Attaché d'abord
aux écuries du maréchal de Vaux, il parait qu'il entra
ensuite au service du gouverneur de la Bastille. La révolution
le trouva établi comme cabaretier, profession qui s'accordait
au mieux avec des habitudes d'ivrognerie qui ne le quittèrent
jamais. Au 14 juillet, ce fut lui, à ce qu'on assure, qui
égorgea l'infortuné de Launay, son ancien maître.
Plusieurs biographes le présentent aussi comme un des meurtriers
des gardes-du-corps massacrés à Versailles dans les
journées des 5 et 6 octobre ; mais d'autres prétendent
que, dès cette époque, il exerçait à
Avignon l'état de roulier. Les troubles qui éclatèrent
en cette ville, au mois d'avril 1791, à l'occasion du projet
de réunion du comtat Venaissin à la France, ayant
donné lieu à la formation d'un corps de volontaires
sous le nom d'armée de Vaucluse, Jourdan, qui ne savait ni
lire ni écrire, et qui ne signait qu'au moyen d'une griffe,
devint général en chef de cette troupe, après
la mort du chevalier Patrix, assassiné par ses soldats. Sous
ce nouveau chef, l'armée de Vaucluse mit tout à feu
et à sang dans le Comtat, dévastant les moissons,
incendiant les églises, les châteaux, et n'épargnant
pas plus les chaumières. Au mois d'août suivant, six
membres de la municipalité et plusieurs citoyens ayant été
emprisonnés à l'instigation de Rovère, Mainvielle
et Duprat jeune, chefs des révolutionnaires de cette commune,
ces fonctionnaires et d'autres détenus, au nombre de 73,
furent, dans la nuit du 16 au 17 octobre, massacrés à
coups de barres de fer par Jourdan et ses satellites. Cette exécution
qui, sous le nom de massacre de la glacière d'Avignon,
a acquis une horrible célébrité, fut suivie
d'un décret d'arrestation émané de l'Assemblée
législative contre Jourdan Coupe-tête ; mais il échappa
aux effets de ce décret, par suite de l'amnistie du mois
de mars 1792 ; alors il entreprit à Avignon le commerce de
la garance. Vers la fin de 1793, Rovère et Poultier ne craignirent
pas de l'investir du commandement de la gendarmerie dans les départements
de Vaucluse et des Bouches-du-Rhône. Il fut, dans ces fonctions,
le pourvoyeur infatigable de la sanguinaire commission populaire
établie à Orange. Un voyage qu'il fit à Paris,
au commencement de 1794, lui procura une éclatante réception
au sein du club des Jacobins. De retour dans le Midi, il eut l'audace
de faire arrêter le représentant Pélissié,
porteur d'un congé de la Convention. La dénonciation
de ce fait amena Jourdan devant le tribunal révolutionnaire.
Il y parut, le 27 mai, portant sur la poitrine une énorme
image de Marat ; mais ce talisman ne le garantit pas contre un arrêt
de mort qui fut exécuté le même jour.
P. A. V.
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comtat
Venaissin
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