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N°
1552. — Lettres Patentes pour entretenir la subordination parmi
les ouvriers dans les pays manufacturiers (*).
Versailles, 12 septembre 1781.
Reg. en parlement le 8 janvier 1782. (R.S. Mars, 1—604.)
Louis, etc. Persuadé que rien n'est plus capable de faire
fleurir les manufactures que de maintenir le bon ordre entre les
fabricants et leurs ouvriers, nous avons jugé nécessaire
de renouveler les dispositions des lettres patentes du 2 janvier
1749, et d'y ajouter les précautions qui nous ont paru capables
d'entretenir la police et la subordination parmi les ouvriers. A
ces causes, de l'avis de notre conseil, et de notre certaine science,
pleine puissance et autorité royale, nous avons dit, déclaré
et ordonné, voulons et nous plaît ce qui suit :
1. Tout ouvrier qui voudra travailler dans une ville dans laquelle
il existe des manufactures, ou dans laquelle il a été
ou sera créé des communautés d'arts et métiers,
sera tenu, lors de son arrivée dans ladite ville, de se faire
enregistrer par nom et surnom au greffe de la police, et sera ledit
enregistrement fait sans frais.
2. Les conventions qui auront été faites entre les
maîtres et les ouvriers seront fidèlement exécutées,
et, en conséquence , lesdits maîtres ne pourront renvoyer
leurs ouvriers, et réciproquement les ouvriers ne pourront
quitter leurs maîtres , avant le terme fixé par lesdits
engagements, s'il n'y a cause légitime.
3. Dans le cas où lesdits engagements n'auront pas de terme
fixe, les ouvriers ne pourront quitter les maîtres chez lesquels
ils travailleront, qu'après avoir achevé les ouvrages
qu'ils auront commencés, avoir remboursé les avances
qui auront pu leur être faites, et avoir averti lesdits maîtres
huit jours auparavant.
4- Lorsque les ouvriers auront rempli le terme de leur engagement,
et qu'à défaut de terme convenu entre eux et leurs
maîtres, ils se seront conformés à ce qui est
prescrit par l'article précédent, les maîtres
seront tenus de leur délivrer un billet de congé,
dont le modèle demeurera annexé à nos présentes
lettres ; et, si le maître ne sait pas signer, le billet de
congé sera délivré à l'ouvrier, du consentement
du maître, par le juge de police. Voulons que lesdits ouvriers
aient un livre, ou cahier, sur lequel seront portés successivement
les différents certificats qui leur seront délivrés
par les maîtres chez lesquels ils auront travaillé,
ou par le juge de police, qui ne pourront audit cas exiger aucuns
honoraires, ni frais d'expédition.
5. Dans le cas où le maître refuserait de donner à
son ouvrier un billet de congé, comme aussi dans le cas où,
pour cause de mauvaise conduite de la part de l'ouvrier, ou de mauvais
traitements de la part du maître, il s'élèverait
quelques contestations entre eux , ils se retireront par-devers
le juge de police, auquel nous enjoignons d'y pourvoir sans délai
et sans frais. Autorisons auxdits cas le juge de police à
délivrer les billets de congé à l'ouvrier s'il
y échoit.
6. Faisons très expresses inhibitions et défenses
à tous entrepreneurs des manufactures, fabricants, contremaîtres
de fabrique ou maîtres-ouvriers tenant boutique, de débaucher
directement ou indirectement aucun ouvrier forain ou domicilié,
et même de lui donner de l'ouvrage qu'il n'ait préalablement
représenté le billet de congé ou certificat
ordonné par l'art. 4 ci-dessus; et ce, à peine contre
les contrevenants de 100 liv. d'amende, et de tous dommages-intérêts
envers le maître qui réclamera l'ouvrier.
7. Et dans le cas où quelques ouvriers ou apprentifs auraient
diverti les métiers, outils ou matières servants à
la fabrique , les maîtres seront tenus de requérir
le lieutenant de police de constater ledit délit, et d'en
dresser procès-verbal, dont leur sera délivré
expédition, laquelle expédition ils remettront à
l'officier chargé du ministère public, pour être
à sa requête les délinquants poursuivis ainsi
qu'il appartiendra.
8. Faisons défenses à tous ouvriers de s'assembler,
même sous prétexte de confrérie, de cabaler
entre eux pour se placer les uns les autres chez des maîtres
ou pour en sortir, et d'exiger des ouvriers, soit français,
soit étrangers, qui auront été choisis par
les maîtres, aucune rétribution de quelque nature que
ce puisse être, à peine d'être poursuivis extraordinairement.
9. Les dispositions de nos présentes lettres seront exécutées,
en ce qui les concerne, par tous les marchands, artisans, apprentifs,
compagnons, garçons de boutique et ouvriers résidants
dans toutes les villes et lieux de notre royaume , et notamment
dans les villes où il a été ou sera par la
suite établi de nouvelles communautés. Si vous mandons,
etc.
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