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Dernière modification: 25/11/2002 Napoléon dépeint par son valet de chambre, Constant
A son retour d'Égypte, l'Empereur était fort maigre et très jaune, le teint cuivré, les yeux assez enfoncés, les formes parfaites, bien qu'un peu grêles alors. J'ai trouvé fort ressemblant le portrait qu'en a fait M. Horace Vernet, dans son tableau d'une revue du premier consul sur la place du Carrousel. Son front était très élevé et découvert; il avait peu de cheveux, surtout sur les tempes; mais ils étaient très fins et très doux. Il les avait châtains et les yeux d'un beau bleu, qui peignaient d'une manière incroyable les diverses émotions dont il était agité, tantôt extrêmement doux et caressants, tantôt sévères et même durs. Sa bouche était très belle, les lèvres égales et un peu serrées, particulièrement dans la mauvaise humeur. Ses dents, sans être rangées fort régulièrement, étaient très blanches et très bonnes ; jamais il ne s'en est plaint. Son nez, de forme grecque, était irréprochable, et son odorat excessivement fin. Enfin, l'ensemble de sa figure était régulièrement beau. Cependant, à cette époque, sa maigreur extrême empêchait qu'on ne distinguât cette beauté des traits, et il en résultait pour toute sa physionomie un effet peu agréable. Il aurait fallu détailler ses traits un à un pour recomposer ensuite et comprendre la régularité parfaite et la beauté du tout. Sa tête était très forte, ayant vingt-deux pouces de circonférence; elle était un peu plus longue que large, par conséquent un peu aplatie sur les tempes; il l'avait extrêmement sensible; aussi je lui faisais ouater ses chapeaux, et j'avais soin de les porter quelques jours dans ma chambre pour les briser. Ses oreilles étaient petites, parfaitement faites et bien placées. L'Empereur avait aussi les pieds extrêmement sensibles ; je faisais porter ses bottes et ses souliers par un garçon de garde-robe, appelé Joseph, qui avait exactement le même pied que l'Empereur. Sa taille était de cinq pieds deux pouces trois lignes; il avait le cou un peu court, les épaules effacées, la poitrine large, très peu velue, la cuisse et la jambe moulées ; son pied était petit, les doigts bien rangés et tout à fait exempts de cors ou durillons; ses bras étaient bien faits et bien attachés; ses mains, admirables ; et les ongles ne les déparaient pas; aussi en avait-il le plus grand soin, comme, au reste, de toute sa personne, mais sans afféterie. Il se rongeait souvent les ongles, mais légèrement; c'était un signe d'impatience ou de préoccupation. Plus tard, il engraissa beaucoup, mais sans rien perdre de la beauté de ses formes; au contraire, il était mieux sous l'Empire que sous le Consulat; sa peau était devenue très blanche, et son teint animé.
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