VOYAGE D’ETUDE AUX
FORTS DE LONCIN ET D’EBEN-EMAEL
SAMEDI 28 AVRIL 2012
Un franc succès pour le premier voyage de la SRAMA et grande participation ! En plus d’un double deck car, plusieurs membres et amis se sont déplacés en voiture. Nous étions vraiment au complet. Signalons ici, l’absence de quelques participants qui n’ont pas prévenu de leur impossibilité de nous accompagner privant ainsi quelques membres, qu’à grand regret, nous avons dû refuser.
Bien que le ciel soit couvert, le temps est doux et pas une goutte de pluie tout au long du voyage, fait très étonnant pour ce mois d’avril 2012 pourri ! Et en route vers le Fort de Loncin.
A l’arrivée, je fus surprise par la « beauté » du site, accueillant, moderne. Comme toujours, nos guides furent excellents et tous, je crois, nous avons apprécié leur disponibilité, gentillesse, savoir et j’ajouterais encore leur dévouement à conserver la mémoire des Héros des jours sombres de notre histoire.
En 1888, lors de sa construction, le fort était considéré comme un dispositif de défense pouvant soutenir un siège prolongé. Vingt-six ans plus tard, l’artillerie allemande avait fait de tels progrès que la carapace de Loncin était devenue un bouclier dérisoire. Des obus-torpilles, de 800 Kg, allaient avoir raison de la résistance du fort d’une manière imparable.
Des centaines de pages seraient nécessaires pour vous narrer les événements se rapportant à la défense du fort de Loncin durant les quelques jours d’août 1914. Le courage, et l’abnégation dont firent preuve les 530 soldats Wallons et Flamands originaires de toutes les provinces de Belgique, vont au delà de ce que l’on peut imaginer. « Se rendre non, jamais ! Vive la Belgique ». Cette scène se passait dans la galerie centrale, à la voûte de laquelle pendait un drapeau tricolore. Encerclés, ces hommes luttaient un contre cent, pour l’honneur et l’existence de la Belgique. En ce 15 août 1914 à 17h20, il n’y avait ni Flamands, ni Wallons, rien que des Belges qui mêlaient jusqu’à leur dernière goutte de sang pour leur Patrie. Ces martyrs du fort de Loncin dorment dans les bras les uns des autres écrasés dans les blocs de béton.
Le 16 août 1914, le Général Leman écrivait au Roi Albert Ier :
« Sire,
…….. Votre Majesté n’ignore pas que j’étais au Fort de Loncin depuis le 6 août à 3 heures du matin.
Vous apprendrez avec chagrin que le fort a sauté hier, à 5h20 du soir et que la plus grande partie de la garnison a été ensevelie sous ses ruines.
Si je n’ai pas perdu la vie dans cette catastrophe, cela tient à ce que mon escorte m’a retiré de la place forte au moment où j’étais suffoqué par le gaz qui se dégageait après l’explosion de la poudre. On me porta dans une tranchée, où je tombai. Un capitaine allemand me donna à boire, puis je fus fait prisonnier et emmené à Liège.
……… Pour l’honneur de nos armes, je n’ai voulu rendre ni la forteresse ni les forts. Daignez me pardonner, Sire !
En Allemagne, où je me rends, ma pensée sera, comme elle l’a toujours été, avec la Belgique et le Roi. J’aurais volontiers donné ma vie pour les servir mieux, mais la mort ne m’a pas été accordée. »
A cette époque, une belle chanson au Nord du pays circulait :
« On est tous les mêmes want we zijn allemaal Belgen
« Oui, je vous aime, ons geheim zijn Vlamingen en Walen in hetzelfde land
« In dit kleine land, ons Belgenland, staan Vlamingen en Walen aan dezelfde kant
« Dat mag toch niet verdwijnen want ik hou van België
« Vandaag staan we zij aan zij et les différences nemen erbij wij
« Vandaag is de eendracht groot, zijn we eensgezind, da’s niet idioot
Pour Loncin, j’ai préféré mettre l’accent sur la « mémoire » : rappeler l’esprit patriotique des Belges de l’époque et leur dévouement pour notre liberté.
J’ai considéré que pour les détails techniques du fort de Loncin, Internet faisait cela mieux que moi !
Je voudrais tout de même signaler qu’au fort de Loncin, un musée consacré à la Guerre Mondiale 1940-1945 a été aménagé et beaucoup d’entre-nous ont été quelque peu frustrés de n’avoir pas eu le temps de le visiter.
La journée était très chargée et le Campanile nous attendait.
Après un bon repas et bon vin, nous étions en route vers le fort d’Eben Emael.
Site très verdoyant, d’environ 75 hectares, avec moutons et petits ânes sympas pour nous « accueillir ».
Ce fort trouve son origine après la guerre de 1870 entre l’Allemagne et la France avec les conséquences désastreuses pour la France et en surplus l’affront pour la France du couronnement, à Versailles, du Roi de Prusse, Guillaume 1er, comme Empereur d’Allemagne.
La conséquence stratégique de 1870-1871 était que si ces deux puissances devaient à nouveau entrer en guerre, elles traverseraient la Belgique. Cette situation décida le gouvernement belge (période 1880-1890) de construire des forts autour d’Anvers, Namur et Liège.
Quand, dans les années ’30, l’Europe recommença à s’agiter, la Belgique décida de renforcer sa défense et quatre nouveaux forts à une plus grande distance de Liège furent construits. L’emplacement d’Eben-Emael fut déterminé par la création du canal Albert. La construction de 1932 à 1935 coûta 24 millions de francs belges et s’étend sur une surface en forme de triangle isocèle ayant une base de 800 mètres et une hauteur de 90 mètres. Des 75 hectares de superficie, 45 ha constituent la superstructure.
Organiquement, le fort était occupé par 1.200 hommes commandés par un major.
Le fort d’Eben-Emael est colossal, avec d’immenses galeries et escaliers sans fin, et composé de coupoles et casemates armées comme à l’origine :
Batterie 1 comprenant les coupoles et les casemates d’artillerie de la superstructure
Batterie 2 comprenant les bunkers de défense appelés « blocs, autour du fort.
Deux grands ventilateurs aspirent l’air et l’insufflent dans les galeries. A un endroit, un puits profond a été creusé vers le rez-de-chaussée. Au pied de celui-ci, un ventilateur a également été installé. Il aspire l’air de l’étage intermédiaire et le distribue par un système de tuyaux à tous les locaux du rez-de-chaussée. Avec l’expérience d’attaque au gaz de la première Guerre Mondiale, il était possible de condamner l’accès direct d’air vers le puits et de le dévier par deux locaux comportant des filtres qui ramèneraient de l’air purifié vers le bas, De ce fait, au rez-de-chaussée, le port du masque à gaz n’était pas nécessaire.
Vu les précautions prises par les Belges, l’objectif des Allemands en 1940 n’aurait jamais pu être atteint par des méthodes orthodoxes ou armes conventionnelles – même pas avec des parachutistes.
Les Allemands envisagèrent de nouvelles méthodes :
Planeurs silencieux et invisibles ;
Armes : charges creuses (origine de l’Américain Munroe), dont la plus lourde pesait 50 kg, formée de deux parties qui devaient être superposées, formant ainsi une demi-sphère. Le principe était que la plus grande partie de la force de l’explosion était concentrée en un point. Pour être efficace, la charge creuse devait être placée intacte et avec soin sur l’objectif. C’est pour cette raison que la charge creuse ne pouvait pas être utilisée par des parachutistes dont l’atterrissage ne se faisait pas assez en douceur, d’où l’usage de planeurs.
L’effet de surprise était aussi un point important : la mission devait restée top secrète.
Les Allemands reçurent l’ordre d’attaque le 9 mai 1940 et le départ eu lieu dans la nuit.
Onze planeurs étaient prévus pour Eben-Emael, seuls neuf atterrirent sur le fort.
Tout devait se passer extrêmement vite, car ce qui ne réussirait pas endéans les 60 premières minutes deviendrait impossible en prévision des contre-attaques belges attendues.
L’attaque du fort d’Eben-Emael était un modèle d’une nouvelle tactique militaire et son succès était dû au secret ; à la surprise ; à l’emploi de planeurs et de charges creuses ; également une discipline sans faille et un bon commandement contribuèrent au succès de l’attaque.
Ce fut la première et à ce jour la plus réussie des attaques aériennes de pionniers connues dans l’histoire de la guerre.
Etant donné que le fort était éloigné de 35 km de la frontière allemande, une attaque aérienne n’avait jamais été imaginée et les Belges supposaient avoir largement le temps nécessaire pour mettre le fort en état d’alerte.
Le premier contact avec l’ennemi fut désastreux pour ceux qui le vécurent. Ils se croyaient en sécurité sous leur béton et blindage et à présent, ils étaient prisonniers dans leur propre fort.
Les points faibles du côté belge étaient : l’absence de tranchées destinées à la défense à courte distance des casemates ; l’absence de mines et de barbelés sur la superstructure ; aucune prévision contre les attaques venant de l’air et l’absence de contre-attaques valables.
Le 10 mai 1940 à 09h00, les premiers Allemands arrivèrent à Eysden, ils commencèrent la construction d’un ponton sur la Meuse, les ponts de Maestricht ayant sautés…… et personne ne pouvait s’imaginer que le fort était en grande partie déjà détruit depuis 04h30 !
Sur les coupoles et les cloches de guet et d’observation, les traces des effets des fameuses charges creuses peuvent être observées, cette arme qui en quelques minutes neutralisa le fleuron des fortifications belges de l’époque.
Avec beaucoup de retard, la visite se termina. Le verre de l’amitié à la buvette nous réconforta des kilomètres parcourus dans cet immense fort imprégné d’une tragique histoire de notre pays.
Tous les participants, dont la plupart aux jambes fatiguées, ont apprécié grandement ce premier voyage de la SRAMA et nous remercions chaleureusement notre vice-président Fons Wuyts.
Merci de votre participation et rendez-vous en juin pour notre périple à Meaux.
Votre secrétaire
Claudine Meurice
Le reportage photographique de cette journée est accessible sur :
https://picasaweb.google.com/100171128013313345118/FortDeLoncinEbenEmaeleLe28Avril2012#