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1er juillet 2002
HAUT LES ARMES!
Sous la Révolution, le Consulat et l'Empire, le
service des troupes, lorsqu'elle n' étaient pas en campagne, était réglé
par l'Ordonnance du ler mars 1768, pour régler le service dans les
places et les quartiers.
Ce règlement, qui fut en application pendant trois quarts de siècles,
imposait, lors de la relève des gardes, un mouvement de maniement qui
ne figurait plus dans le règlement de 1791 ; mais aucun texte officiel
n' était venu préciser les adaptations à faire.
On trouve en effet dans ce règlement les articles suivants :
"Les officiers commandant les détachements
destinés pour les nouvelles gardes, leur feront faire demi-tour à
droite, et ensuite haut les armes, et chaque détachement ira poser ses
armes au-dessous du nom du poste où il devra monter." (titre
10 art 12)
"Après le départ de l'ancienne garde, le
commandant de la nouvelle lui fera faire demi-tour à droite et ensuite
haut les armes pour les placer par division au râtelier des armes du
corps de garde. "(tit. 11, art 28) :
Le mouvement "haut les armes", était
détaillé dans l'ordonnance de 1766, mais n'était plus prescrit dans
le règlement d'exercice de 1791.
Dans ce cas, on peut se demander si ce mouvement était encore effectué
sous la Révolution, le Consulat et l'Empire ?
Les textes nous apprennent que oui :
Ainsi, on lit dans l'Instruction pour l'Infanterie,
du général Krieg (1796) que le caporal de pose, lorsqu'il a relevé
les sentinelles, doit les reconduire en ordre jusqu'au poste, "où
en arrivant devant les armes il leur fera présenter les armes et puis
haut les armes enfin qu'ils les déposent à leur place indiquée,
après les avoir bien essuyées." |
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Dans le Manuel d'Infanterie, édition de 1808, on
trouve l'article 12 de l'ordonnance expliqué de la façon suivante:
"Il fait ensuite faire demi-tour à droite, présenter
les armes, haut les armes et rompre les rangs."
Dans l'édition de 1813 du Mémorial de l'Officier
d'Infanterie, on trouve en commentaire la note suivante, un passage plus précis
encore, qui confirme le maintien de "haut les armes":
"Le règlement d'exercice ne connaît point ce
commandement. Cependant l'usage a prévalu et on l'exécute, quoique les
principes de son exécution ne soient ni écrits ni prévus." (p. 193.)
Dans le Manuel des Gardes Bourgeoises, édité à
Bruxelles en 1830, et qui est entièrement basé sur les règlements et usages
de l'armée française (les cadres de la jeune révolution belge avaient été
formés dans les armées impériales), on trouve un "Extrait de
l'ordonnance concernant le service de l'infanterie dans les places",
sous forme de questions-réponses, et qui reprend en fait les dispositions de
l'ordonnance de 1768, on trouve le passage suivant:
"Le commandant de la nouvelle garde fera en même
temps l'inspection des armes, et après que l'ancienne garde aura ôté la baïonnettes
il mettra la sienne par le flanc, lui fera faire haut les armes, rompre les
rangs, et placer les armes au râtelier, suivant les numéros ; après cela il
enverra au bois et à la chandelle."
De l'ensemble de ces textes, il est clair d'une part que
l'usage de faire "haut les armes" s'est maintenu pendant la Révolution
et l'Empire, et d'autre part que son exécution n'était pas uniforme, à cause
du silence du règlement de 1791. On voit en effet que le Manuel d'Infanterie
de 1808 prescrit de faire faire demi-tour à la troupe, alors que le Manuel
des gardes bourgeoises prescrit un quart de tour.
Le Dictionnaire de l'Armée de Terre, du général
Bardin, ouvrage mis sur le chantier sous l'Empire, et qui ne sera publié qu'en
1841, nous apporte d'utiles précisions sur le sujet:
Haut les armes : Interj. Commandement mixte
fait à une troupe d'infanterie et qui précède le commandement Rompez vos
rangs, et quelquefois simplement le commandement : Marche ; c'est à
ce commandement qu'un instructeur disloque le peloton de ses élèves ou que le
chef d'une garde montante fait entrer au poste les hommes de garde. Les chefs de
poste l'emploient dans tous les cas analogues. ( ... )(2792)
Et au mot "marche !", on lit :
"Quand il [le terme marche] vient après le mot HAUT
LES ARMES, il signifie disloquez-vous ; ces locutions, qui auraient été
d'un français plus correct, n'ont pas été admises, mais auraient eu l'inconvénient
de la longueur de la désinence ; on leur a préféré, à tort ou à raison,
l'impératif singulier Marche, qui se prononce comme d'une seule syllabe,
ce qui favorise l'accomplissement plus instantané du commandement."
On voit, par ces articles, que l'usage de faire faire haut les armes s'était
étendu, qu'il servait à faire rompre les rangs à une troupe dans différentes
circonstances, et qu'il n'y avait pas d'uniformité dans son application.
On pourrait, en reconstitution, l'exécuter de la façon
prescrite par le règlement de 1766 :
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5. Haut les armes. (En deux temps)
Au premier, on portera la main droite sous la
platine sans mouvoir le fusil, le pouce allongé sur la contre-platine,
et le premier doigt appuyé contre le chien.
Au deuxième, en tournant le fusil on le portera
devant soi entre les deux yeux, le canon en dedans, la main droite
embrassant la poignée du fusil près de la sougarde, et plaçant le
pouce droit sur le chien, le premier doigt au-dessus de la sougarde, et
les trois autres au-dessous, le coude droit à hauteur du poignet ; on
saisira en même temps le fusil de la main gauche, la tenant à hauteur
de la cravate, le petit doigt touchant l'extrémité de la platine, le
pouce allongé le long du canon contre la monture, et le canon bien à
plomb près du corps, rapprochant le coude gauche du corps sans le gêner.
(Ordonnance du Roi pour régler l'exercice de l'Infanterie, du 1er
janvier 1766. p 62.)
On pourrait aussi faire le mouvement de présentez
vos armes, puis, en gardant la position des pieds, tenir le fusil comme
dans le deuxième et troisième mouvements de Apprêtez vos armes
(position du second rang).
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Dans l'Ordonnance d'exercice du 1er mars 1746, le mouvement Haut les
Armes, qui précédait celui d'Apprêtez vos armes, était décrit de la
façon suivante :
Haut les armes. En trois temps, Au premier on portera la main droite au
dessous de la platine du fusil, en faisant glisser la crosse de quatre doigts,
et en la tournant avec la main gauche, de sorte que le fusil soit sur son plat,
les coudes élevés à la hauteur du poignet, la tête haute.
Au second, on
détachera le fusil de l'épaule avec la main droite, le bras tendu devant soi à
la hauteur de la cravate.
Au troisième, on
joindra la main gauche au fusil au dessus de la platine, & l'on le rapprochera à
côté de soi en le baissant et le tournant de façon que le canon se trouve entre
la tête et l'épaule droite, la crosse en avant, le fusil droit en avant du
corps, et la main droite un peu plus élevée que le ceinturon.
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